Pas à pas, film après film Yorgos Lanthimos continue de parfaire une Oeuvre de cinéma plastiquement somptueuse et thématiquement passionnante. Après un The Lobster pour le moins atypique ( étonnante fable dystopique mâtinée de surréalisme et d'élégance snobinarde ) et une Mise à Mort du Cerf Sacré visuellement inventive mais un tantinet décevante le réalisateur livre un nouvel écrin formel, se revendiquant clairement du raffinement artistique d'un Peter Greenaway et de la cruauté humaine de l'Oeuvre kubrickienne.
D'emblée les ravissements de Barry Lyndon viennent à l'esprit au regard de La Favorite, aussi bien sur le plan scénaristique que sur le plan esthétique : fresque historique retraçant l'ascension d'une figure principale cynique et sans scrupules prête à tout pour parvenir à ses fins, jeux de duplicité et d'hypocrisie sociale, personnage incarné par Rachel Weisz rappelant celui du loyal et revanchard Lord Bullingdon du chef d'oeuvre de Stanley Kubrick ; éclairages à la bougie de rigueur pour les séquences en intérieur nuit, usage du travelling arrière d'une hypnotique fluidité, travail pictural de l'image et direction artistique particulièrement élaborée...
Greenaway également, puisque cette intrigue enchaînant les perfidies féminines suggèrent l'influence d'un film majeur tel que le renversant Drowning By Numbers ou encore le ludisme d'un Meurtre dans un Jardin Anglais et ses plans pour le moins codifiés. Délicieusement orgiaque, mélange de délicatesse et de trivialité assumée La Favorite est une formidable composition cinématographique sidérante à tous points de vue : costumes, maquillages, coiffures, décors, paysages... Cultivant avec brillance sa noirceur vénéneuse subtilement distillée par Yorgos Lanthimos La Favorite offre à la jeune Emma Stone un rôle quasiment à contre-emploi. Peu ou prou de choses à rajouter au sujet d'un film à la beauté difficilement discutable, certes pas foncièrement révolutionnaire dans ce qu'il raconte mais prodigue en termes d'idées de cinéma. Superbe.