La fièvre du samedi soir, ce film classique. Mais pourquoi ? Arpentez les rues de Brooklyn, passer prendre une part de pizza chez Lenny, allez bosser dans le magasin de peinture de Mr Fusco, répétez vos pas de danses au studio de Philips, manger un bout au White Castle et suivez Tony Manero sur la piste de danse du 2001. Pantalon pattes d'éph, chemise col pelle à tarte, et chaussures cirées obligatoires!
Vis la vie peu inspirante d’un jeune homme qui avait un don mais ne savait pas comment l’exploiter
Vivre de sa passion. Peu d’élus peuvent se vanter d’avoir réussi. Manque de temps, manque de persévérance, manque d’énergie, manque d’argent, toutes les excuses sont bonnes. Parce que oui, c’est une excuse quand on voit qu’à force d’acharnement, certains y sont arrivés alors qu’ils avaient absolument tout pour ne pas réussir. Personnages fictifs, personnages réels, qu’importe, la réalité est bien là. Intéressons nous aujourd’hui à Tony Manero, 19 ans, vivant dans les quartiers défavorisés de Brooklyn, sans doute condamné à passer sa vie comme modeste vendeur de peinture et côtoyer ses petites frappes d’amis. Oui Tony continuera à s’évader de son quotidien en allant danser au 2001 mais ça ne sera qu’un hobby comme un autre.
Nous voila très loin du film optimiste et magique des Dirty Dancing, Flashdance et autres comédies musicales parlant de la réussite de ses rêves. Les paillettes dans les yeux, vous n'en aurez que le soir venu, lorsque Tony ira au 2001. En journée, attendez-vous à vivre une expérience mi-comique, mi-déplaisante. Réaliste, La fièvre du samedi soir ce veut réaliste, nous plongeant dans les quartiers pauvres de Brooklyn, suivant un jeune homme complètement paumé et ses potes peu recommandables autant paumés que lui. Ses parents le prennent pour un raté. Faut dire que chez les Manero, les repas familiaux sont TRES animés. Bienvenue chez les Italiens ! Un coup on en rit, un autre coup on a envie de stopper le film. Les disputes, ça va 5minutes.
Par contre, certains soirs de la semaine, Tony n'est plus le « petit con » égocentrique et détestable qu'il montrait. Sous toute cette couche d’arrogance ce cache un grand sensible, un bourreau de travail un type connaissant ce procédé extraordinaire, celui de se remettre en question. Tony, il faut le voir se préparer. Tout un rituel : séance de méditation inspirée de Bruce Lee (un de ses idoles), brushing méticuleux devant la glace, pose de bijoux autour du cou, petit déhanché pour se mettre dans le bain en remontant la braguette de son pantalon pattes d’éph, oui, Tony vous fera rire, surtout en le voyant porter une longue serviette pour manger les spaghettis de sa maman (qui n’a pas de gout, mais ne tache pas !) avant de partir se défouler.
Ma drogue, c’est la danse.
John Travolta, symbole du disco
A force d’entrainement, Tony est devenu un danseur talentueux et ce, sans prendre de cours. Tony, il fait parti de la catégorie des autodidactes. Son visage s'illumine comme la piste du 2001 sur laquelle il dansera toute la nuit. Il s'illuminera d'autant plus lorsqu'il fera la connaissance de Stephanie, danseuse hors pair habitant depuis peu à Manhattan. Tony laissera lâchement tombé Annette, sa meilleure amie raide dingue de lui, capable de s'ouvrir les veines par amour. Annette dont on a envie et de claquer pour qu’elle se réveille et cesse de faire la gourdasse, Annette que l’on voit consoler en la prenant dans nos bras. La nouvelle partenaire de Tony avec qui il s'entrainera pour remporter le concours de danse organisé au 2001, ça sera Stéphanie. Stephanie et sa superficialité, Stephanie et son égo lui aussi démesuré. En tout cas c’est ce qu’elle laisse transparaitre.
Et si par delà son vécut, ses peines et ses doutes, Tony se réveillait et décidait enfin de prendre sa vie en main en se lançant dans l’inconnu ? Les rapports cruels entre garçons et filles, l’incompréhension entre adultes et jeunes adultes, le rythme et la violence de la société, l’insouciance de la jeunesse rebelle, tant de sujets actuels sembler se perpétrer à chaque génération, tant de sujets peu motivants, donnant plus envie d’en finir avec la vie que de la poursuivre. Oui, La fièvre du samedi soir est très loin du film innocent dont l’affiche semblait nous vendre. Vous les avez toujours les paillettes dans les yeux ?
N’ayez crainte pour autant, le désespoir ne l’emportera pas grâce à Tony nous embarquant à ses cotés au 2001 là où tout le monde fait la fiesta, là où l’éclairage brille et fait rêver. Même pour s’entrainer au Studio de danses, le réalisateur John Badham arrive à nous faire oublier ces petits moments pénibles que nous avons vécu aux cotés de notre héros.
Pour combattre le désespoir, combattre son quotidien morose, oublier ses petits tracas, qu’est ce qu’on fait ? On trouve une alternative pour nous défouler, laissé aller notre frustration perpétuelle. Pour ça, certains fument, d’autres boivent, d’autres font comme les potes de Tony : cogner les mecs d’un clan ennemi, coucher avec des filles à l’arrière de leur voiture et trainer dans les rues en chahutant.
Mais est ce que pour autant ces personnes évoluent ? Est-ce que ça aide à les faire avancer ? Non. Tony, lui, il finira par ouvrir les yeux. Mais quels éléments vont provoquer en lui le déclic ? C’est là que le désespoir laissera place à l’espoir, là qu’on comprendra qu’en remettant en question sa vie, en prenant le risque de tout plaquer et se lancer dans l’inconnu, en refusant de lâcher son objectif, on peut s’en sortir et ne plus chercher des alternatives pour combler le vide en nous. Ca c’est de la motivation ! Ca c’est plus glorieux que toute cette négativité ressentie une bonne majorité du temps passé à regarder La fièvre du samedi soir !
John Travolta, son regard d'ange, ses yeux d’un blanc éclatant, son sourire séduisant, sa fossette au menton, sa démarche hyper cool, et ses talents de danseur quasi inégalables, on a du mal à le détester de par son comportement exécrable (surtout vis à vis de son amie Annette) parce qu’on sait que ce n’est qu’une façade. Hormis sa consommation de cigarettes, pas d’hygiène de vie déplorable contrairement à ses potes. Autant dans ses moments de galère que sous les projecteurs, Travolta illumine notre film. Son couple avec Karen Lynn Gorney sonne juste, et, on ne le répètera pas jamais assez, les musiques des Bee Gees et les sourires du duo Travolta/Gorney donnent à ce film plutôt sombre ce petit brin de rêverie qu'on attendait.
L’horizon est bouché, y aura jamais personne pour nous donner une
chance.
Au final, mise en scène des plus soignées, le spectacle est là sous ses lumières multicolores. La fièvre du samedi soir, sous ses airs d'œuvre ne donnant pas envie de s'y plonger à cause de personnages détestables et de sujets peu réjouissants, prend plus d'intérêt lorsque l'on s'aperçoit que son but était de faire passer un message important. Alors on se laisse séduire, on réfléchit à tout ce qu'on a vu et on comprend la raison pour laquelle ce film disco est devenu un mythe, un classique à voir et revoir.