Oh ! « Sainte Vierge ! » Ce que je peux vous dire, c’est que de ne pas avoir encore revu ce film m’empêchait de vous dire ce que je voulais vous dire, « mais ce que je veux vous dire, je vais vous le dire ». « Et quand j’ai quelque chose à dire, ce n’est pas pour faire du bruit ». Ni pour faire genre car je n’ai certainement pas la prose de Marcel Pagnol.
Comme tous les écrits du fils d’Aubagne, La fille du puisatier version 7ème art sent bon la Provence. Car ici, on parle avé l’accent ! « Le métinge », en parlant du meeting. Entre les expressions typiques de la région, qui d’ailleurs ne manquent pas de faire rire, et le doux chant de l’accent du sud, il suffirait de fermer les yeux pour sentir monter comme une douce odeur de lavande et entendre les cigales. Mais ne fermez pas les yeux, malheureux ! Parce que non seulement vous entendrez les grillons et les cigales, mais aussi parce que vous ne verrez pas les fameux cabotinages de Raimu dont lui seul a le secret.
Raimu nous régale, avec ses sautes d’humeur qui amusent le public, surtout quand elles sont illustrées par des expressions que nous n’entendons nulle part ailleurs que dans la Provence. Tantôt un œil grand ouvert et l’autre (presque) fermé, tantôt en mode poète (« l’oiseau fait tellement vrai qu’on dirait qu’il va chanter » ; « rouge comme une écrevisse bonne à manger »), il affiche une belle palette de jeu d’acteur pour faire de son personnage un ours tendre. Il retrouve Fernandel pour former un duo des plus sympathiques, et qui fonctionne bien à l’écran. Si Fernandel prête à son personnage une finesse exquise pour parvenir l’air de rien à ses rêves les plus fous, c’est tout seul comme un grand qu’il nous fait son show, alors qu’il est laissé seul face à son interminable attente.
Au beau milieu des deux hommes, nous avons la divine présence de Josette Day dans la peau de Patricia, dont nous comprenons aisément que sa beauté puisse faire autant chavirer les cœurs. Mais entre les deux hommes, vient un autre habitué des adaptations pagnolesques : Fernand Charpin, encore en personnage aussi filou que malhonnête, simplement pour protéger ses propres intérêts et ceux de son bellâtre de fils, campé avec beaucoup d’assurance par Georges Grey. Vous l’aurez compris, Raimu, Fernandel et Charpin campent des personnages hauts en couleurs alors que le film est en noir et blanc.
La fille du puisatier fait planer comme un parfum de nostalgie, en ayant immortalisé les us et coutumes d’un autre temps, certes parfois rigides, mais qui permettaient de faire les choses comme il faut (enfin, qu’on disait). Malgré sa désuétude, cette nouvelle adaptation de Pagnol se suit avec beaucoup de plaisir et on n’a qu’une envie : que ça ne s’arrête pas.

Stephenballade
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le 23 janv. 2020

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