Lego La Grande Aventure, comme l'est titré en VF, n'aura jamais porté si bien son nom qu'en VO. Parce que Lego the Movie n'est pas une adaptation de produits Lego, de licences transformés en briques, ou d'un marketing sauvage qui aura embrasé la culture populaire ces dernières années. Lego the Movie, c'est l'adaptation de Lego. De la marque. De sa manière de penser. De son concept. Fruit de l'imagination débordante de Chris Miller et de Phil Lord, déja responsable de l'incroyable Tempête de Boulettes Géantes (le premier hein...) et même de la très chouette adaptation de 21 Jump Street, le film Lego leur permet de s'éclater, de nous proposer leur vision de Lego et de nous assaillir d'un plaisir survolté tout droit sorti de notre enfance.

lego-la-grande-aventure-5Il faut dire que les Lego, maintenant, c'est une incroyable machine à fric. On va pas se mentir, les Lego, ça cartonne pour plusieurs raisons: d'abord les licences, qui permettent de découvrir beaucoup d'univers sous un angle nouveau, ensuite parce que les créations Lego sont d'une inventivité assez folle. Etant moi-même retombé dedans il y a peu, entre les Lego Cuusoo, les vaisseaux Star Wars, les collections de figurines ou autre, la marque fait intervenir à fond les fans et leur font plaisir, tout en permettant, comme à la base de la licence, de se lâcher et de créer des choses de toute pièce avec énormément de réussite pour la plupart. La marque Lego a toujours été un terrain de créativité assez incroyable, tout en permettant à tout le monde de se faire plaisir avec des produits de toutes sortes, que ce soit des licences connus ou non. Faire un film Lego sur cette réussite, sur cet état d'esprit était presque naturel tant la déferlante de la marque a été incroyable ces dernières années, il suffit de voir le nombre des jeux Lego qu'on a eu droit pour s'en convaincre - et c'est pas fini. Confier cette tâche à un duo de réalisateur-scénariste était une excellente idée, tout en laissant leur laissant le champ libre, puisque évidemment c'est le maître mot de l'entreprise.

Lego the Movie raconte donc l'histoire d'Emmet, un Lego ouvrier tout ce qu'il y a de plus banal, dans une ville ordinaire qui est régi par des lois précises et un rythme précis dont personne ne peut se libérer. Puis un beau jour, Emmet rencontre Cool Tag (Wyldstyle en VO), une héroïne qui va lui annoncer qu'il est le Spécial, un lego légendaire chargé d'aider les Maîtres Constructeurs (en gros, ceux qui ne sont pas dans le système et qui arrivent à créer des choses inédites) à lutter contre Lord Business, le méchant qui veut instaurer un ordre sans pitié. Tout ce joyeux bordel va devoir faire évoluer Emmet, qui a du mal à persuader les autres qu'il est vraiment spécial, alors que lui-même n'est même pas convaincu qu'il l'est. Bref, un point de départ et un scénario à priori simple, sauf que le caractère de ces personnages ne s'arrêtent pas là. Alors que gravitent autour d'Emmet une foule de personnages tous plus dingues que les autres (Batman, Benny cosmonaute des années 80, un robot-pirate), le petit ouvrier est comme exclu de la bande, ne sachant jamais faire ce que les autres font. Surtout, le personnage est amené comme un mouton, un lego ordinaire incapable de créer la moindre chose parce qu'il se contente de lire les instructions (ceux de la boîte en quelque sorte). Evidemment, le discours n'est pas compliqué à deviner: les legos, c'est un outil de création. Et alors que suivre les instructions de construction d'un set est aussi un plaisir de gosse, celui de récupérer des pièces ici et là pour créer quelque chose de nouveau est un plaisir encore plus grand. Un concept qui fait écho avec un système global toujours plus persuasif et invasif, qui cherche trop souvent à contrôler le quidam ordinaire pour l'empêcher de créer.

bande-annonce-film-lego-grande-aventureDes thèmes qu'on a déja vu pas mal de fois, mais qui reste efficace dans le sens où ce n'est pas une simple aventure destiné aux enfants et à faire vendre des produits, les propos sont aussi là pour étayer tout le concept génial de la marque, qui est de créer des choses autant que possibles, que ce soit avec des briques ou n'importe quoi d'autre. Mais le truc en plus du film, là où les réalisateurs sont malins et qu'ils vont amener le concept encore plus loin, c'est la surprise qui arrive dans le dernier quart du film (dont on se doute fortement au cours du métrage) et qui amène les propos dans une autre dimension. Je ne veux pas spoiler mais si vous voulez garder un maximum de surprises, passez au paragraphe suivant. Sachez que ce dernier morceau pourra être perçue de deux façons différentes (déja vue dans certaines critiques): soit comme un gigantesque slogan faussement guimauve afin de vendre un principe, une idée dans la tête des enfants, soit un discours intelligent sur l'envie de créer et surtout du désir de contrôle de tout un chacun, de la perte de la magie, du rêve et de cette course au réalisme qui fait souvent défaut dans la culture d'aujourd'hui. Une volonté d'afficher ce qui rend l'imagination aussi importanet aujourd'hui parce qu'elle est capable d'apporter énormément de choses. Un vrai désir de retour à l'imagination qui fait vraiment plaisir à voir, dans un monde où les univers veulent toujours plus de logique et de cohérence. Evidemment, j'opte pour la seconde option, parce que sachant ce que font les réalisateurs dans leurs autres film, j'ai vraiment du mal à y voir un placement publicitaire.

On passe au gros point fort du film: l'humour. Le film va à 300 à l'heure, pourra paraître trop speed pour beaucoup, pourtant, l'image est souvent très lisible, même si l'action peut sembler brouillonne, ça marche vraiment bien. Les blagues fonctionnent au quart de poil, et tous les petits effets "Lego" (fumée, eau, etc...) sont super bien pensés et incroyablement soignés. On sourit tout le temps face aux multiples idées à la minute pour convertir tout en Lego et on rigole à pleine gorge face au pauvre Green Lantern qui joue les potes un peu relou avec Superman, le mage blanc complètement aveugle ou encore Batman qui se la joue crooner en faisant une chanson gothique sur son personnage. Ça part dans tous les sens, en se moquant des images populaires avec intelligence, et le film est un bijou d'écriture: les dialogues font mouche à chaque fois. Un vrai délire de geek/gosse qui fera autant plaisir aux grands qu'aux petits (le film étant un carton partout dans le monde). Le rythme faiblit très rarement, et on voit pas DU TOUT le temps passer.

Puis vient le côté technique. Réalisé par Animal Logic principalement en 3D mais avec des touches de stop-motion, le film a l'intelligence d'être animé et pensé en Lego, comme les courts-métrages qui pullulent sur le net. Ça marche du tonnerre, et vu que le rendu est photo-réaliste avec tout ce que ça comporte de micro-défauts de fabrication (Benny le cosmonaute est INCROYABLE de crédibilité), ça donne au film un effet spectaculaire et totalement fou. Fou, le film l'est tout le temps: dans les explosions, dans les animations des personnages, dans leurs expressions de visage en 2D-autocollants qui marchent du tonnerre, dans les effets d'océan, dans la multiplication des décors qui nous offrent une ville moderne ou une vallée désertique incroyable. Les décors sont sublimes, jouent souvent avec l'effet macro, et possèdent des ambiances et des lumières de folie. Couplé à une réal de haute volée, le film fait un quasi sans-faute pour tout ce qui est pure technique, associé à des doubleurs impeccables (Chris Pratt, Elisabeth Banks, Will Arnett, Will Ferrel, Morgan Freeman, Liam Neeson...). Les personnages sont géniaux, que ce soit le truc mignon Unikitty, le bon-mauvais flic, Cool Tag, Business et tous les autres. Et on prend un plaisir incroyable à reconnaître les personnages de Lego, les anciens comme les nouveaux.

Voilà, Lego the Movie est une bombe absolue, un vent de fraîcheur qui fait du bien dans le monde de l'animation, et qui réussit à éviter l'écueil "marketing" sans pour autant l'abandonner complètement tout en étant extrêmement malin pour parler de marque. Mon avis n'est peut-être pas objectif parce que j'aime la marque depuis un moment, encore plus ces derniers mois, mais même quelqu'un qui n'est pas spécialement fan des briques sera forcé de reconnaître l'immense qualité visuelle du film et pourra même être touché par le message qui se sert de Lego pour s'émanciper et parler de choses qui vont au-delà de la simple brique de construction. Un vrai tour de force, un appel à la création, un plaisir de gosse, tout simplement.
Cronos
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le 21 févr. 2014

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