Dernier film de Mike Nichols, Charlie Wilson’s War est un salut au drapeau les doigts croisés, une réussite tenant d’une fierté évidente d’être cinéaste et américain mais pas sans sa touche de défiance. Parle-t-on de quatrième mur au Pentagone ? Peu lui importe, Nichols plane comme un toit d’immeuble au-dessus des nuages imprésivisibles de la satisfaction spectatoriale.
Hanks est dans la peau du député Charlie Wilson, qui fut impliqué dans le rôle des États-Unis dans la guerre d’Afghanistan. Relativement peu engagé au premier abord, le film nous enfonce dans les couloirs du vrai gouvernement ; celui qui s’affaire, pas celui qui parle. Reagan est un Big Brother invisible et muet derrière le Congrès, petites mains qui s’activent et délèguent à d’autres comme Amy Adams, décidément épatante en tout, et ce dans les rafales d’un contexte titanesque. Car c’est le contexte qui forme le reproche le plus facile à faire à ce genre d’Hommes du président. Chez ceux de Wilson, il est délivré en continu au spectateur, comme les dépêches dont l’homme se nourrit ; des centaines et des centaines de lignes qui alimentent sans interruption une action qui serait autrement incompréhensible.
Mélange de J. Edgar (Clint Eastwood, 2011) et d’Independence Day (Roland Emmerich, 1996) (si l’on remplace les aliens par des Russes et Bill Pullman par Tom Hanks), c’est une perle de film politique, abondant en documentation (même si elle vient du livre, il s’agissait d’une décision cinématographique que de l’implanter sans s’engager du côté légèrement plus actuel du terrorisme) et parfait pour transformer un grand nom d’acteur en grand nom du monde réel pendant deux petites heures. Le scénario n’est juste pas très assuré dans ses va-et-vients entre l’histoire et sa dérision : le staff féminin de Wilson doit vraiment beaucoup à Amy Adams pour ne pas faire rire, et les lignes pince-sans-rire de Seymour Hoffman nous font souvent oublier la raison d’être du protagoniste.
La fin est un peu molle ; sans doute voulait-on souligner que la fin de la Guerre d’Afghanistan était molle aussi, « hommage » sans doute à l’histoire vraie voulant que le Géant étasunien marche sur ses ennemis sans relever ses alliés. Comme le disait Charlie Wilson lui-même: « These things happened. They were glorious and they changed the world… and then we fucked up the end game« . C’est en partie à Tom Hanks (acteur et producteur) qu’on doit une fin certes modeste, mais qui évite d’être fuckupée.
Quantième Art