Dans un vertige de mort

Voilà un film sur lequel il faudrait revenir, dense malgré sa courte durée, presque hermétique si l'on ne prend pas la peine d'y concentrer son attention : succession de photographies accompagnées d'une voix-off à l'écriture soutenue La Jetée est un poème d'amour saisissant dont le dénouement reste tout à fait original, montrant d'une certaine façon la fragilité d'un instant et la complexité du Temps.

Si trente et quelques années plus tard Terry Gilliam réalisera le remake absolument génial du film de Chris Marker ce photo-roman propose déjà une superbe matière première en cette année 1962, un scénario obsédant digne de la meilleure anticipation qui soit. Le montage du film, particulièrement réussi, nous offre des moments de glissement dans l'onirisme tout à fait savoureux, notamment par l'utilisation du fondu enchaîné. Les images fixes, alimentées d'un mouvement paradoxal opéré par la bande-son et la voix-off, sont d'une magnifique puissance évocatrice et restent en mémoire longtemps après le visionnage...

Certes le film ne choisit pas la carte de la facilité et demeure plus qu'abrupt dans sa narration, mais reste également unique en son genre et novateur pour son époque. Une oeuvre poétique et très touchante, moins flamboyante que L'armée des 12 Singes dans sa portée mais tout de même plus que correcte si l'on parvient à la pénétrer. Un classique.