Voilà ce que je suis en sortant de la salle.


Lors de plusieurs passages chantés je sentais parfois monter cette euphorie mais qui n'arrivait jamais tout à fait.
Je n'ai compris pourquoi qu'au moment où j'ai ré-écouté la bande originale du film : j'avais envie de danser. Là, j'avais envie de danser. Il y avait donc un problème de rythme.
Car si la musique est rythmée (Justin Hurwitz a fait un travail remarquable), l'image l'est beaucoup moins, même lors de cette première scène tant citée : la caméra flotte, les danseurs font des acrobaties plus qu'ils ne dansent, la musique est là mais on ne vibre pas.
Pire, on s'ennuie presque face à la répétition et à la grossièreté des effets de mise en scène de ces séquences chantées. Imaginez un personnage dans une pièce, les lumières autour de lui s'éteignent et une douche de lumière l'enveloppe (répétez l'opération une bonne demi-douzaine de fois). Une technique très utile pour expliquer au spectateur que c'est à ces moments-là qu'il doit être ému (un peu comme les rires enregistrés des sitcoms).


Malheureusement, ça ne fonctionne pas et pour comprendre pourquoi, je dois parler d'un autre problème : Mia et Sebastian (et a fortiori des enjeux dramatiques de la deuxième partie du film, beaucoup moins musicale et plus axée sur le scénario).
C'est simple, ils se parlent si peu qu'il est difficile d'y voir clair dans leur relation et quand la scène de


la séparation à table


survient, nous n'avons pas toutes les clefs. Cette scène est charnière et pourtant elle est survolée et expédiée alors qu'on voudrait qu'elle dure et qu'elle aille plus loin.


Mia fermait-elle vraiment les yeux sur les raisons qui ont poussé Sebastian à jouer dans le groupe de Keith pour être à ce point outrée ? Sebastian a aussi peut-être pris goût au succès, peut-être qu'il a peur de plaquer tout ça pour ouvrir son jazz club, peut-être qu'il a aussi peur de ne plus pouvoir subvenir aux besoins de Mia, mais parlez-vous bordel !


Aussi, contrairement au personnage de Sebastian, on a très peu d'empathie pour le personnage de Mia. Quand Sebastian vient chercher quelqu'un, il klaxonne. Ca prête à sourire et en faisant revenir ce trait de caractère, ça nous attache au personnage . Mia n'a pas de trait équivalent. On ne sait rien d'elle et le seul moment où on aurait pu en savoir plus (sa pièce autobiographique), on nous en montre rien du tout.
On dirait que Damien Chazelle porte moins d'attention à ses personnages qu'à sa musique et qu'à sa tentative de critique du système Hollywoodien.


Et pour finir en beauté, le film se termine d'une manière cruelle qui frustre les spectateurs :


Pourquoi ne pas finir sur le rêve de Mia ? On le sait bien qu'il est faux, mais revenir à la réalité pour nous montrer Sebastian anéanti devant son piano était surement l'une des fins les plus frustrantes. Ou alors pour que cette fin soit satisfaisante, il aurait fallu que Mia et Sebastian tentent de se remettre ensemble lors de leur conversation sur le banc CUT "5 ans plus tard" et là PAF ils sont plus ensemble, mais au moins on sait qu'ils ont essayé.


La pensée est un peu décousue mais sachez qu'en dehors de sa musique et de ses comédiens, La La Land échoue presque partout : quand il essaye d'être une comédie musicale, quand il essaye d'être une comédie romantique et quand il essaye (peut-être) d'être une critique du système hollywoodien.


J'aurais vraiment aimé adorer ce film.
En tout cas, j'écoute la musique en boucle et une chose est sure : j'ai envie de danser.

GabrielBismuth
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le 31 janv. 2017

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