La loi du marché pose la question de la représentation sociale au cinéma, de l'angle à adopter pour qu'elle soit percutante et de la part de romanesque à lui associer pour qu'elle puisse respirer.


Avec Quelques heures de printemps, Stéphane Brizé avait réalisé un film tendu et puissant à l'émotion brute. S'il loupe son coup ici, c'est parce que le parti pris adopté crée l'asphyxie et perd en route sa vocation humaniste. Plus le récit avance, plus l'enfermement s'impose, plus le film étouffe. Quand la seule respiration régénérante arrive enfin, c'est la fin.


À trop nous plonger dans un quotidien que l'on connaît (par sa vie-même ou par personne interposée), en en rajoutant un peu (pas beaucoup, mais trop) dans les difficultés, frôlant de près le misérabilisme, et surtout, en ne regardant jamais ailleurs (ou à peine), La loi du marché finit par ne ressembler qu'à un reportage d'investigation sur le chômage et la précarité.


On ne pourra pas dire que Vincent Lindon n'a pas mérité son prix d'interprétation cannois. Il porte le film, l'habite et maintient le cap, donnant à chaque scène l'évidence du réel. Il devient finalement le seul élément de fiction du film, lui qui réussit pourtant à être crédible dans chacun des rôles qu'il aborde.


Dans un registre proche, on préfèrera La vie domestique, le film d'Isabelle Czajka réussissant à donner du souffle et du rythme au portrait tout aussi angoissant d'un quotidien sans horizon. En comparaison, La loi du marché ne réussit qu'à être déprimant.

pierreAfeu
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le 25 mai 2015

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pierreAfeu

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