Je n'avais pas tellement aimé la première adaptation de "La guerre des mondes", film un peu trop crétin à mon goût. Pourtant quand j'ai lu dans le livret accompagnant le DVD qu'un des héritiers d'H.G. Wells, ayant beaucoup aimé le film, a accordé au producteur George Pal le droit de faire une autre adaptation, ce qui a donné "La machine à explorer le temps", j'ai eu une grande envie de voir cet autre film dont j'avais oublié l'existence. C'est un petit classique, dont le design de la fameuse machine a depuis inspiré aussi bien Futurama que le jeu-vidéo Legoland (souvenirs d'enfance...)
Et puis j'aime bien les fictions sur le voyage dans le temps.
J'aurais dû me méfier...

Le principal problème du film, d’où découlent la plupart de ses défauts, c’est qu’il prend les spectateurs pour des demeurés.
L’introduction présente des horloges qui flottent dans un espace noir, à la façon des objets du générique de The twilight zone (ou The scary door, toujours pour parler de Futurama ; vous avez remarqué que mon pseudo est Fry3000 au passage ?). Pour exploiter la même idée, le personnage principal du film, qui n’est autre qu’H.G. Wells lui-même, a pleins d’horloges et de sabliers chez lui. A quoi ça sert, concrètement, si ce n’est à rappeler au spectateur de façon lourde quel est le thème du film ? En y repensant, c’est vrai qu’on pourrait adresser le même reproche au premier Retour vers le futur, sauf que les horloges y ont une petite fonction dans une des premières séquences.
En plus de ça, dans La machine à explorer le temps, les personnages ne cessent de répéter des expressions du genre de "waste of time", "time to go", "you’ve all the time in the world", … pfou, on a compris.

H.G. Wells parle de son projet de "time machine" à ses amis, tous l’air d’être des gentlemen ayant certainement reçu une bonne éducation vu leur richesse apparente et leurs métiers qui requièrent de grandes connaissances (médecin, botaniste, …), et pourtant ils parlent comme des gamins. Ils expliquent de façon on ne peut plus bête ce que sont les 3 dimensions, afin d’être compris même des spectateurs les moins éduqués. L’un des personnages déclare que si l’on a tendance à ignorer la 4ème dimension, c’est parce qu’on ne peut se déplacer dedans (lol).
Wells leur présente une miniature de la time machine qu’il a construite… et qui est fonctionnelle ! C’est complètement con, pourquoi s’être fatigué à créer une miniature, sûrement beaucoup plus chiante à faire marcher qu’un modèle grandeur nature ? Surtout qu’à ce moment là du film, la vraie machine est déjà construite.
J’ai du mal à croire qu’un personnage assez intelligent pour concevoir une machine à explorer le temps à l’époque victorienne soit aussi sot que Wells peut l’être par moments, tel qu’il est présenté dans ce film. Il est tout à fait conscient qu’il voyage dans le temps, et pourtant une fois arrivé dans le futur, en voyant le descendant d’un ami à lui, il croit que ce dernier est costumé pour un bal masqué.
Le film en lui-même manque tout autant de logique. La machine du titre permet d’avancer dans le temps progressivement, et de voir l’environnement autour comme si on avait appuyé sur le bouton "fast-forward" lors de la lecture d’une VHS, on ne va pas d’un point précis dans le temps à un autre de façon immédiate comme c’est le cas dans Retour vers le futur. Si en étant dans la machine on voit les gens agir en accéléré, pourquoi eux ne voient-ils par Wells et la machine ?
Il y a aussi des questions à se poser sur le fait que certains éléments demeurent inchangés autour de Wells et sa demeure, même après un demi-siècle et deux guerres mondiales (sérieusement, le magasin garde le même mannequin en vitrine aussi longtemps ?).

Les effets spéciaux de La guerre des mondes, réalisé 7 ans plus tôt, n’étaient pas si mal ; les trucages auraient pu être un élément remontant le niveau dans La machine à explorer le temps. Or, ils sont très décevants. La disparition de la machine lors du premier voyage est effectuée par un effet de fondu et de flou.
Tous les effets sont dans l’idée très simplistes, mais ils sont plus sympa à voir quand on assiste en accéléré au déplacement d’un escargot, la fonte d’une bougie, l’éclosion de fleurs, les changements d’habits d’un mannequin. Enfin je dois avouer que c’est un plaisir très enfantin que j’ai eu en voyant ça, car autrement il n’y a rien de particulièrement remarquable dans tout ça.
On manque encore de logique quand on voit des gens se déplacer à une vitesse différente des autres éléments ; en plus de ça ces images sont accompagnées d’une petite musique qui en font un gag du niveau d’un Benny Hill ou un programme pour amuser les bambins.
Pour certaines scènes, il y a beaucoup de miniatures utilisées au cours du film. Elles sont amusantes à voir, mais pas le moins du monde réalistes (contrairement à celles de, eh, devinez quoi… La guerre des mondes, où il y avait des destructions de maquettes bluffantes).
Le plus con, c’est quand pleins de gros plans de maquettes sont mêlés à des stock-shots d’un volcan en éruption, et des plans de Wells dans un parc : on ne comprend rien de l’espace, ni comment le personnage peut se trouver au milieu de ce chaos provoqué par une attaque nucléaire et rester en vie.
Je vais faire une autre comparaison, avec un film vu hier, Les 10 commandements. Il y avait là-dedans des plans composites assez surprenants, ayant leurs défauts, mais très bons pour l’époque. C’était 4 ans avant La machine à explorer le temps, qui comporte des plans composites assez moches, on dirait un collage de morceaux de décors. Mais il y a surtout un plan avec une erreur infâme à un moment : on voit des personnages passer sous de l’herbe, qui fait partie d’une autre zone de l’image.

On atteint un autre niveau de ridicule dans la seconde partie du film qui se déroule au 100ème siècle ou au-delà. Il y a les Morlocks, des créatures souterraines au look d’un kitsch stupéfiant, qui font virer tout le film en plein dans la série Z.
Déjà que le futur de l’humanité présenté par La machine à explorer le temps est complètement con et inconsistant : tous les humains sont devenus des abrutis sans émotions, qui ne se soucient pas que quelqu’un meure juste à côté d’eux, qui vivent ne connaissent pas le mot "épeler" mais comprennent les mots "lois" et "gouvernement" alors qu’ils en sont dépourvus, et qui n’ont jamais vu du feu mais comprennent exactement ce qu’il faut faire quand on leur réclame un objet à brûler.
Cerise sur le gâteau, il y a une romance qui naît entre Wells et une fille du futur. C’est pas difficile à voir : à chaque fois que les deux personnages se parlent, on a cette musique cliché. Une histoire d’amour aussi absurde que celle entre Charlton Heston et la femme sauvage muette dans La planète des singes.

La machine à explorer le temps : un film complètement idiot qui m’a à peine diverti.
Fry3000
4
Écrit par

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le 5 nov. 2012

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Wykydtron IV

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