Dans le genre fantastique, la famille Tourneur a aussi un père qui a son mot à dire.

Maurice reprends le mythe de Faust dans cette étrange histoire d'un peintre qui échange son âme contre une main capable d'enfin réaliser les oeuvres dont il rêve et de séduire à nouveau l'abominable greluche qui le traite comme un caniche nain unijambiste.

Tourné pendant la guerre pour la Continental, le film fait partie de ces rares exemples de bon fantastique à la française, un film d'une maîtrise qui n'existe plus depuis bien longtemps.

Parce qu'en fait, c'est chouette un film qui s'appelle la main du diable et qui ne se sente pas obligé de jouer avec tous les défauts des films Z, comme ça viendra après. En fait, le film est très habilement normal, à part peut-être une musique un peu appuyée et une scène superfétatoire dans la boîte mystérieuse que le scénariste Jean-Paul Le Chanois regrettait beaucoup.

En effet, en adaptant La Main enchantée de Gérard de Nerval, il essaye de redonner au genre sa vraie raison d'être, tout en suggestion, en doute, sans jamais basculer dans le grand-guignol. Maurice Tourneur joue merveilleusement avec ça, avec une mise en scène très habile, chargée d'une atmosphère mystérieuse mais qui sait faire la place aussi aux scènes quotidiennes.

Ainsi, le film commence d'emblée dans le vif du sujet, avec un hôtel un peu perdu, bloqué par les neiges, ses clients pittoresques et bavards et puis deux coups de feu dans la nuit, et un manchot entre avec une petite boîte sous le bras...

Pierre Fresnay est comme d'habitude formidable, il excelle en peintre médiocre sans orgueil comme en proie paranoïaque, c'est toujours un véritable bonheur de le suivre.

Par contre, là où je m'insurge, c'est pour Noël Roquevert, mon autre idole, le pape des seconds rôles, le génie du cabotinage contrôlé... Dans ce film, il joue un chef cuisinier italien, avec accent... oui, oui, italien... pour le plus franchouillard de nos comédiens, c'est un peu fort, à tel point qu'il l'oublie une fois sur deux, son accent, et que ça devient presque un supplice de le voir dans ce rôle là...

Une jolie pépite toutefois, que les nombreux amateurs du genre présents ici devraient essayer de voir à l'occasion.



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le 21 juin 2012

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Torpenn

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