Patrick Dewaere et Patrick Bouchitey incarnent deux personnages qui n'ont rien en commun. Chacun est ce que l'autre hait. Patrick Dewaere, l'homme viril par excellence, se rit avec vice d'un Patrick Bouchitey dérangeant, artiste efféminé, qui cherche quant à lui à toujours être dans la discussion. Les deux se retrouvant à gérer la même colonie de vacances, la situation ne peut qu'exploser.
L'avantage d'un ennemi, c'est qu'il est plus sincère qu'un ami.
Szczepan Yamenski
Mais font-ils vraiment preuve de sincérité ? C'est ce qui m'a tracassé durant tout le film : je me suis demandé si les personnages se haïssaient vraiment. A première vue, c'est ce que l'on pourrait croire, mais il y a toujours des non-dits, des sujets évités, comme s'il y avait quelque chose de gênant à ignorer, à savoir une homosexualité refoulée par le personnage de Patrick Dewaere.
Ils se détestent alors encore d'autant plus, de par cette attirance enfouie. Et Dewaere ne manque pas de nous le faire savoir dans de superbes scènes de moqueries. Décidément, il sait jouer tous les rôles ; il aurait été autant à l'aise dans celui du personnage fragile et timide. Et c'est d'ailleurs ce qu'il montre, par moments, en le cachant par une raillerie ou par de l'irritation. Le rôle de Patrick Bouchitey est beaucoup plus lisible, moins ambigu, et moins intéressant aussi.
L'épilogue de fin, s'il est satisfaisant et fait sens, est tout de même un peu simpliste. J'ai du mal à croire à cette amabilité soudaine. On va dire que le temps efface tous les maux. De même, le coup de couteau en tant qu'apothéose n'était franchement pas nécessaire à mon goût, ça sort un peu de nulle part, et ça fait retomber la tension accumulée au préalable.
En bref, La Meilleure Façon de marcher est un drame subtil sur la rivalité et la tolérance. L'interprétation étant assurée par une petite brochette de bons acteurs (évidemment Dewaere, mais aussi Michel Blanc avec un petit rôle bien présent, ou encore Claude Piéplu dont je ne me lasse pas de la voix), on se retrouve avec un bon film français à morale.
Aime tes ennemis. C'est le meilleur moyen de leur porter sur les nerfs.
Bernard Werber