Alors attention ! Ce film n’est pas un biopic sur Bruce Lee, comme le laisse entendre bons nombres de détracteurs, qui à mon avis n’ont pas compris le réel objectif de cette production.
Bien que le film s’inspire du combat mythique entre Wong Jack Man et Bruce Lee, dont tout bon fan du "Petit Dragon" a forcément entendu parler. L’intérêt de découvrir cette fiction, se porte sur un message philosophique des arts martiaux, avant tout.


Beaucoup de questions demeurent encore, plus de cinquante ans après ce combat qui eu lieu à San Francisco. Les conditions et les raisons de ce combat animent encore les débats et toutes les conversations entre passionnés de Bruce Lee et détracteurs. Chacun se forge son avis sur l’intérêt de cet affrontement, et impose son vainqueur par conviction. Personnellement, je n’y étais pas ce jour-là, et je ne peux me permettre de juger le film sur ce point précis. En revanche, je vais vous donner mon ressenti sur son but.


Dans un premier temps, je tiens à vous informer que le film ne met pas Bruce Lee au premier plan, il est dépeint comme une star naissante, convaincue, prétentieuse et sur ses gardes. Il souhaite imposer son savoir, son art et ses convictions à travers le cinéma et la télévision en bottant des culs (terme employé dans le film). Cependant, il connaît les réticences des Chinois à ce que leur art soit enseigné aux étrangers. Il enseigne pourtant le wing chun à qui veut apprendre, ne se fixant aucun critère d’origines en ce qui concerne ses élèves.


Dans un second temps, on nous propose de découvrir son futur adversaire, le maître de kung fu, Wong Jack Man. Bien loin des légendes qui ont toujours contés qu’il débarqua en Amérique pour affronter Bruce Lee, nous découvrons un homme sage, venu de Shaolin pour éclaircir son esprit après un combat dans lequel il estime n’avoir pas su, se maîtriser. Il ne cherche pas spécialement à rencontrer Bruce Lee, c’est ce dernier qui, persuader qu’il débarque pour l’affronter, va chercher à le provoquer.


Ce qui fera le lien entre les deux experts dans cette histoire vraie, mais ici totalement romancée, est un amour interdit entre Steve McKee et une jeune Chinoise contrainte à travailler dans un restaurant pour payer sa dette d’immigration aux Etats-Unis auprès de malfrats. Cette romance et ces personnages sont fictifs, Steve McKee est un élève de Bruce Lee, écorché vif et perdu, qui souhaite voir son maître trouver enfin, un adversaire à la hauteur de son professeur. Lorsque Wong Jack Man débarque, il part à sa rencontre pour lui demander un cours, afin, certainement, d’étudier les différences entre les deux mentors. Les raisons qu’il évoquera pour apprendre ne satisferont pas le maître débarqué…


On a toujours entendu dire, que les triades chinoises avaient organisé l’affrontement de ces deux maîtres, mais ici, c’est Steve McKee, qui réussit à occasionner ce combat, dans un but noble. S’il arrive à provoquer ce duel, il pourra libérer sa belle de la dette qu’elle paye auprès de malfrats. Et ainsi, vivre auprès de son amour. Dans cet objectif charitable, Wong Jack Man finit par accepter le duel.


Vous l’aurez compris, je pense. Le personnage de Wong Jack Man est le véritable héros du film. Un homme sage, qui ne cède à aucunes menaces ou provocations. Sa pratique et son savoir, ne doivent pas servir un spectacle ou un égo démesuré. Les arts martiaux, servent à se connaître soi-même, à travers l’esprit. Les limites à franchir ne sont pas celles de la violence, mais de la maîtrise du corps et de l’esprit, une communion apaisante et objective. Et c’est de cette force psychique et poétique, que le film va véritablement tirer sa force.
Alors que Bruce Lee cherche à devenir une star, l’issue de ce combat, lui permettra, une réflexion sur sa pratique, son état d’esprit, et son éloquence.


Pour ma part, je trouve le film noble, on voit toujours Bruce Lee comme le meilleur et le plus grand artiste martial de tous les temps, mais on oublie souvent que pour devenir grand, il faut d’abord grandir. L’apprentissage des arts martiaux au fil des années est une chose, mais certaines rencontres peuvent être tout aussi bénéfiques. Celle-ci, malgré que l’on dise qu’il est gagné cette rencontre ou pas, n’aura que rendu le "Petit Dragon" plus fort ! Puisqu’après cet affrontement, il créa son propre art martial, le "Jeet kun Do". Un concept basé sur plusieurs techniques et styles martial, forgeant une voie de libération.


Tout n’est pas parfait dans ce film, bien entendu...
Les comédiens sont très approximatifs, Philip Ng ("New Police Story", "Bodyguard & Assassins") dans le rôle du Petit Dragon, me parait limite convaincant, mais en même temps qui peut égaler Bruce Lee ?! Ce qui me gêne le plus, ce sont les clichés utilisés. Les mimiques exagérées et les reproductions de quelques éléments qui ont servi ses films à merveilles, mais semblent totalement inutiles ici. Xia Yu ("Dragon Squad", "Wind Blast"), s’en sort un peu mieux dans le rôle de Wong Jack Man, il impose une certaine allure à son personnage, le rendant très respectable. Billy Magnussen ("Le Pont des Espions", "The Big Short") se voit camper un personnage fictif, qui n’arrive pas à sensibilisé le spectateur, mais ce n’était pas le but. Et la comédienne, Jingjing Qu ("Voyage en Chine") n’a pas suffisamment de scènes pour étaler ses talents, on appréciera toutefois son beau minois.


Le film est réalisé par James Nolfi, on lui doit le film fantastique "L’Agence", le scénario est écrit par Christopher Wilkinson, auteur du film "Nixon" et co-auteur du biopic "Ali". La photographie est sommaire et délicate et les chorégraphies de combats insensés. Quelques beaux gestes sont à noter malgré tout, ils viennent ponctuer les quelques duels qui parsèment le film. Certains artifices peuvent tout de même dérangés les amateurs de Bruce Lee, lui qui avait pour habitude de proposer des combats réalistes. Il ne doit pourtant pas en vouloir à la symbolique des quelques scènes de voltiges, puisqu’elles servent à imager la sérénité.


Je n’ai pas trouvé ce film si mauvais que la réputation dont il fait frais, je pense qu’il faut simplement se saisir du message de paix et de la quête philosophique qu’il dégage. J’avais d’énormes appréhensions sur ce projet, au final, ce n’est pas si déplaisant. On est loin, de la vérité historique, c’est certains. Mais l’essentiel est que le divertissement proposé ne sert ni Bruce Lee, ni Wong Jack Man, mais une manière de penser, de pratiquer et d’évoluer.


Voici, un film qui rend hommage avant tout au fondement des arts martiaux et c’est comme tel, qu’il aurait dû être vendu.
www.cinevor.com

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le 30 mars 2018

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