
C'est un thriller qui franchement met du temps à démarrer, si bien qu'on se demande pendant la première demi-heure si on a vraiment affaire à un thriller. On nous expose différentes situations ou problématiques qui n'ont pas encore de lien entre elles. Et puis tout ça s'enclenche peu à peu, avec parfois des accélérations ou évolutions de situation brutales, déstabilisantes. Au milieu du film, on a soudain l'impression de se retrouver dans quelque chose comme le dernier Kubrick ("Eyes Wide Shut"). Et finalement on réalise qu'on est en train de voir un des très bons longs-métrages de l'année.
Le scénario est à la fois simple et complexe. Quand on y réfléchit, on peut même le trouver un peu tiré par les cheveux. Et il comporte aussi d'étonnantes subtilités. Par ex., au début du film, le professeur de littérature au chômage (dont le grand souci est une adorable fille de 12 ans hélas leucémique) passe devant une bijouterie, se baisse et ramasse quelque chose qui s'avère être une pièce de puzzle, il la regarde et ne sachant qu'en faire, la rejette sur le trottoir. Aux deux-tiers du film, un autre professeur, cette fois de mathématiques et qui vient d'être libéré de prison (après y avoir été interné pendant 10 ans pour avoir "couvert" Barbara, la "nina de fuego"), achève un vaste puzzle, sauf que la dernière pièce du puzzle est manquante. Il la cherche en vain. Et forcément, on se dit que la pièce de puzzle qu'avait ramassée le prof de littérature est la pièce manquante. Et on cherche une interprétation à tout ça (le puzzle symbolisant probablement la "nina de fuego"). Ça donne une idée du degré de sophistication du scénario.
On aura compris que ça n'est pas un thriller survitaminé, pétaradant, etc. Au contraire, le rythme est lent, on sent passer les deux heures (et sept minutes). Mais on reste intéressé et intrigué jusqu'au bout. Et finalement l'histoire et ses personnages sont suffisamment prenants pour vous trotter dans la tête des heures après que vous avez quitté la salle de projection. C'est souvent à ça qu'on reconnaît les bons films, on reste sous leur emprise bien après le générique de fin.