Ce film est une prouesse artistique, il vaut d'être regardé pour cela. L'histoire est un alibi pour regarder tous ces tableaux s'animer. Mais pas seulement. Ce scénario paradoxal, un des personnages du film le critique ainsi (citation approchante issue de mon souvenir) : "vous êtes obsédés par la mort de Van Gogh, mais que savez-vous de sa vie ?".
En effet, toute l'histoire tourne autour d'une enquête sur la mort de Van Gogh. Et c'est en général autour de ce sujet, ou celui de la crise de démence qui a occasionné l'auto-mutilation du peintre, que tournent les films sur Van Gogh. S'interroger sur cela, sans s'interroger sur qui était Van Gogh et de quoi était faite son âme, est une quête futile. Et pourtant, c'est en bonne partie ce que fait le film.
Mais il permet néanmoins de rendre justice à ce qui faisait de Van Gogh un être vivant, son hyper sensibilité, sa volonté de reconnaissance par la société, son amour tendre et passionné pour toute chose. Malgré cela, il a été traité comme un moins que rien une bonne partie de sa vie, avant de découvrir la peinture, et de peindre sans relâche, mais toujours sans vendre un tableau. On lui a alors fait comprendre qu'il n'était qu'un poids pour les siens, au lieu de rendre hommage à sa qualité d'être vivant. Jusqu'à le tuer.
Ce film me fait nécessairement penser à toutes les bonnes âmes rejetées par la société, car incapables de s'intégrer dans des systèmes de valeurs complètement futiles, où le rejet de tout ce qui n'est pas profitable économiquement (notamment pour les autres, ceux qui possèdent et s'enrichissent de cette propriété) est la norme. Les bonnes âmes sont très souvent tuées par la violence des autres, ou par le sentiment d'injustice, d'exclusion. Car cet amour de toute chose va souvent également avec le désir de pouvoir exprimer cet amour et d'être aimé de la même façon en retour.