Dévisage, transfigure.
Au rang des personnages historiques, Jeanne d’Arc compte son lot d’adaptations cinématographiques, la demoiselle offrant tout ce qu’une saga peut escompter : destinée hors du commun, grandes...
le 3 juin 2020
35 j'aime
2
Désirant combler mes lacunes sur le cinéma des années 1920 et 1930, je décide de regarder La passion de Jeanne d’Arc ; mise en scène par le grand Dreyer qui s’intéressait beaucoup à la foi et à la religion. Deux raisons viennent supporter ce choix. Primo, Antonin Artaud est à l’affiche. Deusio, Jeanne d’Arc, je n’y connais rien et je me dis que ce sera l’occasion d’en apprendre un peu plus sur la Pucelle de France. Seulement, j’oubliais bêtement un détail : ce film est muet.
Pour le spectateur du XXIème siècle que je suis, très peu familiarisé – pour le moment, mais je vais me faire violence – à ce genre de cinéma, c’est un peu comme si le procès de Jeanne d’Arc était le mien, hérétique du cinéma muet que je suis. Le premier quart (voire tiers) du film souffre d’affreuses longueurs, la musique de la version Masters of Cinema m’est insupportable et le procès de Jeanne (qui est aussi le mien) tarde à se mettre en place. Néanmoins, ma condamnation tombe : je suis un peu buté, je finirai ce que j’ai commencé et ce malgré cette musique irritante.
Quand soudain, comme Jeanne, c’est l’illumination (et le blasphème) : puisque la musique est indépendante du film et qu’elle à deux doigts de me faire renoncer, je coupe le son, vais sur youtube et lance la série des Luv (Sic) de Nujabes et Shing02. Croyez-le ou non, l’abstract hip-hop ne m’a pas simplement facilité le visionnage, il me l’a fait aimer. Il m’a fait ressentir plus justement et avec intérêt la passion de Jeanne, magnifiquement interprétée par Maria Falconetti qui fait passer beaucoup par le regard.
Carl Theodor Dreyer, par son utilisation volontairement abusive du gros plan, nous fait perdre toute notion spatiale. Comme la Sainte prête à abjurer, nous sommes perdus, encerclés par ces mauvaises têtes antipathiques et inquisitrices à la calvitie volontaire aussi irritante que la musique précédemment tue. Ces gros plans sont efficaces à la fois pour nous rapprocher de Jeanne et pour nous éloigner de ces hommes d’Église peints par Dreyer à la manière de démons.
Une œuvre belle et poétique, un peu lente mais à voir en prenant soin de choisir soi-même la bande-son.
Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Films (re)vus en 2017, Les meilleurs films avec une héroïne, Les meilleurs films se déroulant au Moyen Âge et Les meilleurs biopics
Créée
le 8 mars 2017
Critique lue 230 fois
1 j'aime
D'autres avis sur La Passion de Jeanne d'Arc
Au rang des personnages historiques, Jeanne d’Arc compte son lot d’adaptations cinématographiques, la demoiselle offrant tout ce qu’une saga peut escompter : destinée hors du commun, grandes...
le 3 juin 2020
35 j'aime
2
Je sais que tu n'en as rien à faire mais je vais causer un peu de moi et puis, promis, on passe aux choses sérieuses. Je suis natif de Rouen. Et je peux dire que j'en ai sucé et re-sucé de la...
Par
le 7 janv. 2013
35 j'aime
31
Lorsque la mise en scène d’un film épouse à la perfection son propos, on peut d’ores et déjà parler d’un mariage heureux. Mais il arrive que la forme transcende le fond, d’une telle force que le...
le 3 juil. 2016
23 j'aime
7
Du même critique
[SAISONS 1&2] Le topo : The Expanse est l’adaptation, par la chaîne SyFy, de la série de romans éponyme écrite par James S. A. Corey (pseudonyme des auteurs américains D. Abraham et T. Frank)...
Par
le 8 oct. 2017
11 j'aime
[S01E03] [Critique et note destinées à évoluer] Une chose est sûre : Star Trek : Discovery porte son nom comme une combinaison spatiale réalisée sur-mesure. Effectivement, il s’agit pour moi d’une...
Par
le 8 oct. 2017
7 j'aime
2
Damien Saez et moi, c’est une histoire d’amour – ou d’amitié – à sens unique. Une histoire d’amour sous-entend toutes ces choses : coups de cœur, coups de colère, instantanés de velours,...
Par
le 30 mars 2017
7 j'aime
2