J'ai l'impression que la comédie musicale est un genre qui se marie plutôt bien avec les autres. Je l'ai déjà vu se mêler au drame (Dancer in the Dark) et au policier (8 Femmes), mais le film de genre, j'avoue que c'est inédit !
Le terme n'est pas forcément le plus approprié, mais c'est le premier qui me vient à l'esprit quand je vois Audrey II, cette plante à l'appétit insatiable. Elle est clairement l’élément-phare du film, tout comme elle est l'attraction principale du fleuriste dans l'histoire. Elle prend des traits de plus en plus humains à mesure qu'elle grandit, jusqu'à obtenir la capacité de parler. Audrey II devient alors un personnage à part entière, qui porte le film du fait de son rôle clé dans le récit mais aussi par le comique de situation qu'elle apporte. En effet, la voir supplier le héros de bien vouloir lui apporter à manger, c'est assez cocasse. La marionnette est remarquablement animée, surtout au niveau des lèvres, mais cela n'a rien d'étonnant quand on sait que Frank Oz avait travaillé auparavant sur Les Muppet et Dark Crystal.
Bien sûr, avec un protagoniste aussi abracadabrant, il est clair que La Petite Boutique des horreurs ne se prend pas au sérieux. Le long-métrage reprend à la lettre certains codes de la comédie musicale et détourne les autres, mais dans les deux cas il y va toujours à fond. Ainsi, les personnages sont des clichés sur pattes (le loser aux réactions puériles, la potiche blonde, le rival à la fois cool et cinglé) mais leurs actions improbables et leur jeu volontairement mauvais rendent l'ensemble excentrique, mais étrangement fascinant à regarder. De la même manière, les décors ont un aspect artificiel et kitsch (comme souvent dans les comédies musicales), et pourtant le réalisateur maintient le côté décalé de l’œuvre en proposant des environnements tristes et ternes.
Du côté des chansons, il y a à boire et à manger. Elles se basent majoritairement sur des sujets banals et/ou peu adapté à la musique, ce qui est une bonne idée qui rejoint le ton déprimé (mais pas déprimant) du film. Elles sont correctes, mais malheureusement ne restent pas en tête. Cela est sans doute dû qu'elles s'enchaînent très vite. C'est quelque chose qui m'énerve particulièrement car cela étouffe complètement l'intrigue. L'ensemble un peu se rattrape sur les effets comiques, notamment les trois filles noires formant un chœur qui apparait de nulle part à chaque interlude musical. Quant au scénario, il se laisse suivre, mais se conclut de manière décevante. Je me suis renseigné, et apparemment cette fin était voulue par les producteurs. J'ai eu l'occasion de voir la version alternative, qui se révèle bien plus drôle. Je vous conseille donc de voir la Director's Cut.
La Petite Boutique des horreurs est une comédie musicale sympathique, mais elle souffre selon moi d'un trop grand nombre de chansons. Par ailleurs, la mise en scène est discrète et n'a manifestement pas envie de faire dans le grandiose, elle ne permet donc pas à l’œuvre de prendre son envol. Reste au film son univers original et son humour franchement réussi, en particulier lors de la petite apparition de Bill Murray, qui vaut le coup d’œil.