L'Homme n'est qu'une sous race
Adaptée d'un livre qu'on ne présente plus, la planète des singes part d'une idée excellente : inverser le rapport de force Homme-animal dans une époque futuriste. Ici, l'Homme n'est qu'une sous-race, une larve, un virus pour ces singes si intelligents et civilisés.
Commençons par les forces du film.
Premièrement, les enjeux sont clairs dès le début. Après le crash de leur navette, Taylor et ses deux équipiers doivent rapidement retrouver nourriture et eau pour survivre sur cette planète inconnue (accessoirement des formes vivantes).
Deuxièmement, décors et effets spéciaux sont plutôt crédibles et réussis pour l'époque. Même si les déguisements m'ont fait exploser de rire aux premiers abords.
Troisièmement, la façon dont les singes traitent les hommes remet en question nos pratiques et nos idéaux. En clair, comment réagirions-nous si nous étions traités de la sorte ?
De plus, lorsque les singes rejettent en bloc toute théorie sur l'évolution de leur espèce allant à l'encontre des leurs et traitent leurs scientifiques d'hérétiques, nous faisons immédiatement le rapprochement avec les idées bornées dont l'Homme est capable de faire preuve. (cf. la Terre est ronde).
Quatrièmement, durant la période où Taylor est incapable de parler et que les singes le prennent pour un attardé, on se dit intérieurement : « Putain mais montre à ces connards prétentieux que t'es plus intelligent qu'eux ! » Cette frustration nous permet d'être captivé par l'histoire.
Dernièrement, les acteurs jouent juste, Charlton Heston est attachant et sa femelle bipède est bonne (bien que pas épilée des sourcils).
Point neutre : la réalisation, notamment les zooms brutaux, et la musique angoissante, dans des moments où elle n'a pas lieu d'être, m'ont paru archaïques. Néanmoins, l'époque (1969) permet de relativiser ces points.
Maintenant, attardons nous sur les incohérences et les faiblesses.
Premièrement, Taylor se prend une balle dans la gorge et est atteint de mutisme comme ses amis humains. Déjà pas très crédible... Puis tout d'un coup, par miracle, il retrouve l'usage de sa voix. Totalement incohérent.
Deuxièmement, 2000 ans plus tard, la langue de Shakespeare n'a pas évolué. Les singes comprennent parfaitement Taylor et parlent exactement comme lui. Je ne remets pas en cause cette facilité scénaristique qui est, selon moi, justifiée. Cependant, quelques nuances et incompréhensions (ex : changements/sens des mots) entre les 2 espèces auraient rendu l’œuvre plus crédible et cohérente.
Troisièmement, Taylor trouve-t-il de la mousse à raser par magie ? Je doute fortement que les singes en possèdent vu qu'il trouvent cette pratique : « bizarre ».
Dernièrement, le twist final. [Spoilers] Dès la vue des pics, j'ai reconnu la coiffe de la statue de la liberté. Personnellement, je n'ai absolument pas été surpris. Je pensais que Schaffner voulait volontairement nous dire que la planète en question était bien la Terre avec des indices plus qu'explicites. A savoir les inventions de l'Homme, la photographie et les armes, reprises par le singe et la longue scène de la fouille archéologique. En clair, j'imaginais que le dénouement final allait être totalement différent.
Néanmoins, Schaffner nous apporte sa vision concernant le futur de l'humanité : détruit par l'Homme lui-même à grand coup de bombe atomique. Banal pour notre génération mais couillu pour l'époque.
En conclusion, la planète des singes est un film qui part d'une idée brillante mais qui souffre de trop grandes faiblesses et incohérences pour être apprécié à sa juste valeur. Toutefois, cela reste un long-métrage divertissant, révolutionnaire et de qualité.