Après la bonne surprise des Origines et un Affrontement décevant, place à la Suprématie. La trilogie se termine sur une bonne note, malgré quelques réserves.


La première heure est grandiose. Les hommes montent à l'assaut de l'antre des singes se situant dans la forêt. Ils sont sur leur territoire et on peut y voir un nouveau Vietnam. Cela se confirme avec les inscriptions sur leurs casques "Kill Donkey" en référence à Full Metal Jacket. Le combat se déroule sur un rythme différent avec une alternance des sons lors des échanges de tirs et les corps qui tombent, la musique avec la caméra survolant le champ de bataille et le silence durant l'appel à l'aide de Preacher (Gabriel Chavarria). C'est intense, comme l'arrivée de Cesar (Andy Serkis) face aux prisonniers. Cela monte d'un cran lorsque Cesar croise le regard du Colonel (Woody Harrelson). La haine est immense entre ces deux adversaires, au point de me mettre des frissons. Ce moment est émotionnellement très fort. On aura d'autres scènes émouvante, mais aucune d'elles n'aura la puissance de cette première rencontre.


L'Affrontement cède la place à un duel entre Cesar et le Colonel. Le premier en fait une affaire personnelle, au détriment de son peuple. Le second est pris dans la spirale de sa folie et devient l'ennemi de l'humanité. Le film de guerre se transforme en un western, Cesar est un cavalier solitaire style Clint Eastwood mais pas pour très longtemps. Il ne peut pas exercer sa vengeance tout seul et ses proches se joignent à lui, malgré son désaccord. Maurice (Karin Konoval) maintient l'équilibre face à la soif de vengeance de Cesar. Il prend une jeune fille (Amiah Miller) sous son aile, à nouveau contre l'avis de Cesar. Il est le sage, celui qui permet à Cesar de ne pas devenir un nouveau Koba (Tony Kebbell), car l'ombre de celui-ci plane dans l'esprit de leur chef. Il se sent responsable de ses actes et de ses répercussions. La noirceur du film est troublante. Le blockbuster semble vouloir offrir une réflexion sur notre comportement, en nous mettant face à nos responsabilités.


La rencontre avec Bad Ape (Steve Zahn) semble être une concession au sein d'une oeuvre se voulant intelligente. Certes, il apporte quelques sourires, mais avait-on besoin de ce clown pour faire avancer l'intrigue. Il m'insupporte et gâche un peu le plaisir. Malheureusement, il ne sera pas le seul élément causant une baisse d'intensité dans la seconde heure. L'égoïsme de Cesar; résultant de sa souffrance; a causé l'enferment des siens. Cette situation nous renvoie aux heures sombres de notre civilisation. Cela nous rappelle un camp d'extermination où la discipline des soldats ressemblent à celle des nazis. Mais pas seulement, les coups de fouet nous renvoie à l'esclavage avec cette soi-disant supériorité de l'homme sur d'autres hommes, avec la complicité d'autres primates. Le film s'inspire des exactions commises par notre civilisation à travers son histoire et la propension de l'homme a détruire, au lieu de construire un havre de paix. La guerre est son moteur, avec ce besoin irrépressible de pouvoir, de domination, de vouloir absolument être le mâle dominant. Cette obsession va le mener à sa perte. Les singes vont lui succéder et pouvoir rendre cette terre plus agréable, du moins c'était sa première intention.


La réflexion sur notre monde est intéressante, mais des facilités scénaristiques affaiblissent son propos. La découverte du tunnel par le pénible Bad Ape. Le fait de maintenir Cesar en vie, même si on peut l'expliquer par le besoin du Colonel de le briser psychologiquement devant les siens. Le final où tout s’enchaîne avec facilité et simplicité. Cela ne rend pas pour autant le spectacle fade, on va encore vibrer et même avoir la larme à l’œil, mais cela reste décevant par rapport à son immense première partie. Puis le côté biblique ne me stimule pas vraiment. La neige s'ouvre devant eux pour leur permettre de se rendre en terre sainte, après avoir surmonter de nombreux obstacles, ce n'est pas vraiment ma tasse d’athée.


Le Colonel nous fait forcément penser au colonel Kurtz (Marlon Brandon) dans Apocalypse Now. Sa folie, sa solitude au sein de son antre surplombant ses hommes et son crâne rasé participe à cette affiliation. Les références se succèdent, elles sont aussi bien cinématographique, littéraire, biblique et historique. C'est plutôt confortable d'avancer dans cette histoire en se reposant sur nos connaissances. Ce n'est pas évident de mettre tout cela en forme et Matt Reeves réussit presque à rendre sa fresque digeste. C'est une bonne surprise, tant il m'avait déçu avec Affrontement. Pour ce dernier volet, il a pu s'atteler au projet dès le début. C'est son oeuvre. Il a réussi à combiner le grand spectacle, tout en suscitant de l'émotion et réflexion au sein d'un blockbuster.


Un quatrième volet ne serait pas du luxe. Après Cesar, on peut se concentrer sur l'évolution de Cornelius (Devyn Dalton) avec Maurice en mentor. On pourrait aussi assister à la mise en place de la hiérarchie au sein de cette nouvelle société, voir la chute de la statue de la liberté et en parallèle la destinée de la jeune fille. Le lien avec La Planète des Singes serait alors entièrement établi et vu la qualité de Suprématie, ce ne serait pas une si mauvaise idée.


Un blockbuster sombre et violent, sans être sanglant où sa violence est surtout palpable dans les regards et attitudes des protagonistes. C'est une bonne surprise nous faisant passée par diverses émotions et dont la première heure est un must du genre. Un film à voir en salles pour apprécier son souffle épique, la beauté de sa mise en scène, de la musique de Michael Giacchino et la mise en abîme de l'être humain.

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le 6 août 2017

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Laurent Doe

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