La Planète Sauvage est une oeuvre d'animation à part dans ce qui s'est fait et probablement dans ce qui se fera, de par la qualité du dessin et de par son imagination débridée, car c'est ici l'aspect le plus réussi de ce dessin animé, la qualité graphique a été semble-t-il privilégiée par rapport à la fluidité de l'animation et c'est aussi bien. Il ne s'agit pas de faire un procès à l'animation actuelle mais il faut reconnaître que la performance visuelle est aujourd'hui favorisée par rapport à la personnalité du dessin, rendant les oeuvres des Pixar et autres Dreamworks interchangeables.

Ici, le dessin est travaillé dans le seul but d'une traduction esthétique de l'histoire, le grain est souvent visible et le trait n'est pas toujours d'une grande netteté ce qui, paradoxalement, donne plus de vie et de réalisme à l'oeuvre finale. Le résultat est somptueux de beauté et d'imagination et c'est là l'un des points forts, la faune de cette planète, imaginée par René Laloux, est à la fois burlesque,fascinante et parfois repoussante et se rapproche beaucoup du travail de Léo sur Les Mondes d'Aldébaran.

L'histoire est déjà connue et déjà à été abordée dans un épisode de La Quatrième Dimension, dans le livre de Bernard Werber Nos Amis Les Humains ou même dans La Planète Des Singes. On imagine des extra-terrestres gigantesques débarquant sur une terre mourante et capturant des humains pour en faire des animaux de compagnie. Le thème est universel et dans ce film, il ouvre une multitude de réflexions possibles comme par exemple la question de la légitimité de la supériorité d'une race ou d'une espèce sur une autre. Ce dessin animé s'adresse à mon avis principalement aux civilisations occidentales et les interroge sur leur rapport à leur environnement et aux autres civilisations. Un des moments les plus frappants restera pour moi quand ces extra-terrestres se mettent à écraser sous leurs pieds des humains comme s'il s'agissait de fourmis, on ne peut résister à l'idée que l'on a soi-même fait un jour ce geste avec d'autres êtres vivants, on notera également l'incroyable et glaçante séance de déshommisation d'un parc. C'est dans l'accès à la connaissance à travers un casque d'enseignement volé aux extra-terrestres, que les humains trouveront leur salut, devenant par là même capables de bâtir les outils de leur délivrance et accéder ainsi à leur salut, s'exiler sur la planète sauvage.

La bande-son d'époque, omniprésente et entêtante sans être démodée, fait furieusement penser aux débuts des Pink Floyd, beaucoup d'expérimentation sonore, une structure proche de la symphonie et un thème musical qui sert de fil rouge. Ce dessin-animé reste une authentique expérience et, même s'il n'a pas bénéficié des moyens de l'animation d'aujourd'hui, il garde une personnalité si forte et unique qu'il ne vieillira pas.
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le 27 nov. 2012

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