Le cinéaste mexicain Escalante continue d'élaborer avec sa Région Sauvage une mise en scène toujours très élégante et précise, qui trouve ici un sens nouveau dans l'intrusion de la science fiction. Si la ville est le terrain de la déroute familiale où les tabous sexuels enferment les personnages dans le mensonge, la rancœur voire la violence, la campagne est un univers mystérieux, confronté à la puissance des éléments et à la potentielle interaction avec des forces extra-planétaires. J'aime beaucoup ce cinéaste pour Sangre (2005), qui porte habituellement ses thématiques vers le cinéma social et politique, et pourquoi pas via le prisme du genre (thriller criminel pour Los bastardos ou Heli), mais ici le changement de cadre est une réelle bonne idée, puisque le croisement entre le film de science-fiction et la parabole érotique permet de focaliser l'attention sur de puissantes images de pulsions, de prédation, de tentations en tout genre. Certains plans assez longs sur cette nature toute puissante et évocatrice sont vraiment beaux, notamment celui de ces racines d'arbre mises à nues vers lesquelles on se rapproche insidieusement,


ou encore ce plan plutôt gonflé et réussi de partouze générale entre animaux.


On sent naturellement les influences de Possession (Zulawski) pour le


le côté tentaculaire, dangereux et en même temps fascinant, excitant de cette créature qui peut donner du plaisir pour peu qu'on lui laisse un total contrôle.


La fascination que le réalisateur parvient à créer autour de cette cabane où tout est possible demeure le plus intéressant dans cette histoire.
Je suis un peu moins fan de la partie se déroulant à la ville, notamment à cause du personnage trop caricatural du mari lâche :


Personnage forcément homo refoulé, forcément violent, forcément bourré dans la boîte de nuit...


et de sa famille assez glaçante. Il y a beaucoup de thématiques qui se confrontent (notamment la consommation animale en plus de tout le reste), mais le film de S.F finit par être un peu accessoire et la conclusion abrupte est quand même sacrément frustrante à ce niveau. Peut-être qu'une durée plus étendue aurait aéré l'ensemble et donné plus de liens entre les deux mondes. Cela reste très réussi et troublant néanmoins.

Narval
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le 28 juil. 2018

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Narval

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