La Reine des Neiges par Julie_D

Il existe un adage prétendant qu'"un Disney n'est jamais aussi bon que son méchant", auquel j'ai longtemps cru moi-même (et qui font de Basile Détective Privé ou de Bernard et Bianca deux de mes films préférés de la firme). Pourtant jamais l'adulte que je suis - tout de même capable de voir et de revoir des films d'animation sans cynisme - n'aura été autant emballée par un Disney qu'avec Frozen, fresque dépourvue de la figure du méchant et qui s'évertuera d'ailleurs tout du long à briser plus d'un cliché inhérent aux films Disney.

Ce n'est pas qu'il ne s'agisse pas là d'un classique, bien au contraire. Rarement un Disney aura été si musical, si lyrique, si émotionnel... Si le film est d'une qualité plastique exceptionnelle (la séquence du palais de glace est une merveille de technicité, les décors du Fjord gelé sont à couper le souffle) c'est avant tout la narration extraordinaire qui fait sa force, et prouve que le studio est revenu, depuis quelques années, à son talent premier : raconter des histoires. Ainsi, même coincé dans la courte durée de pellicule et de temps vécu propre aux dessins animés pour enfants, le scénario développe des personnages fins et se base avant tout sur la complexité des relations entre eux (relation brisée entre Elsa et Anna, ou précipitée entre Anna et Hans).


Le montage est très réussi et de fait chaque scène est justifiée, minutieusement sculptée dans le bloc de glace narratif qu'est Frozen, chansons comprises, servant à introduire les personnages, ou à réellement faire avancer l'histoire. A ce titre, le morceau "Do you want to build a snowman ?" et ses trois variations graduelles compose une séquence tout à fait remarquable, couvrant dix ans en trois minutes tout en étant capable de rendre compte des émotions des personnages. Ce sont eux, et particulièrement le duo Anna / Elsa, qui sont le cœur du film, mon seul regret tenant d'ailleurs au faible temps d'écran consacré à la perception d'Elsa sur les événements, tant cette Reine des Neiges est l'un des personnages les plus fascinants jamais créés par Disney. Anna est l'héroine, mais nul doute que beaucoup s'identifieront à sa sœur aînée, torturée par une différence qui n'appelait pas à tant de malheur.

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Au final, Frozen est avant tout un film parfaitement équilibré, entre aventure, humour et émotion brute (si vous avez une sœur, vous êtes obligés de le (re)voir avec elle) dont le point d'orgue reste les messages véhiculés, implicites ou explicites. Difficile de trop en dire sans gâcher quelques surprises du scénario, mais reste qu'avoir deux sœurs comme réelles héroines du film et ne jamais voir ces princesses devenir des "demoiselles en détresse" est une vraie respiration (et un pas en avant que l'on espère suivi de beaucoup d'autres.) Rare aussi qu'un film sorti de studios aussi codifiés et manichéens ait pour esprit et thème central l'idée que l'on peut être soi-même ("Let it go") tout différent que l'on puisse être, et être aimé très exactement comme cela.

Finalement, presque plus que sa déclaration (clichée mais très vraie) sur les effets magiques de l'amour que l'on veut bien donner aux autres, c'est un message aussi malin qu'inattendu que délivre ce dernier Disney : naître différent n'est une malédiction que si l'on réagit comme tel.