Guillaume Nicloux nous offre un film d'une sobriété et d'une justesse percutantes. Interprété par des actrices passionnées et investies dans des rôles éprouvants, elles se retrouvent tantôt déchirées entre haine, passion dévorante et soif de liberté.
Plus qu'un film sur la Religion, "La Religieuse" est avant tout un film sur la foi, la foi en l'Homme.
Et pour ne rien gâcher, le montage, l'éclairage et les cadrages nous donnent à voir de véritables tableaux. Une palette de couleurs, d'abord aux teintes pâles et froides, qui s'épanouissent et fleurissent au fil du film.
Les plans, serrés dans un premier temps, mettent en exergue le dénuement et la détresse de l'héroïne (placée dans un environnement familial et religieux à la fois hostile, aveugle et sourd à ses appels, voire à son existence) pour s'ouvrir ensuite sur des décors, des paysages et des visages qui semblent renaître à la vie à la fin du film.
Là où certains crient au film "Anti-Religion", nous avons affaire, en réalité, à un film profondément Humaniste. Prônant la liberté d'expression où trouver son bonheur réside dans la voie que l'on a choisie, dans le respect total de soi et d'autrui.
"La Vérité vous rendra libres" disent les détracteurs du film en citant la Bible.
Oui, leur répondra-t-on, l'héroïne a suivi sa propre vérité, celle de ne pas choisir la religion de Dieu, mais la sienne propre, c'est là sa liberté. Même si le chemin est semé d'embûches, elle trouve à ses côtés des alliés précieux, tels que la justice (l'avocat), le respect (l'évêque et le prêtre), l'écoute et l'amour (la Mère de Boni).
Alors, Suzanne renaît, interprétée par l'excellente Pauline Etienne dont le visage retrouve peu à peu ses couleurs, dès lors qu'elle est enfin libre de ne pas faire ce qu'elle n'a pas choisi de faire. Elle est enfin libre d'être, tout simplement.
Par ailleurs, on remarquera un léger sur-jeu dans les personnages plus extrêmes, interprétés par Louise Bourgoin et Isabelle Huppert.
Si l'emportement un peu trop fébrile et appuyé d'Huppert et les sévices presque sadiques de Bourgoin peuvent sembler légèrement "fabriqués" ; on peut finir par les trouver plausibles sous l'angle d'un des paradoxes de la vie monacale : calme, quiétude, rigueur, discipline et auto-contrôle peuvent parfois changer n'importe quel petit débordement du coeur et de l'âme, en passions dévorantes et destructrices.
Ce film est en fin de compte une ode à l'épanouissement, religieux ou non. Un combat pour la liberté qui promet d'être encore plus intense et tortueux dans l'oeuvre de Diderot que je vais m'empresser d'acheter.