Depuis quelques temps déjà je rêve de lire du O. Henry, vous savez, ce type à la vie improbable qui s'est fait une spécialité dans les nouvelles sur les gens du peuple, les paumés, les banals, les sans grades...
Une critique récente n'a pas peu joué d'ailleurs dans la réactualisation de cette envie (http://www.senscritique.com/livre/Contes_du_Far_West/critique/26936644) mais pour l'instant, je n'ai pas encore pu mettre la main sur un bouquin du bonhomme, alors, pour patienter, je profite de la rétro Henry Hathaway à la cinémathèque pour découvrir une sorte de film hommage par la Fox pour les quatre-vingt-dix ans de sa naissance ou je ne sais quel autre prétexte...

C'est donc un film à sketches, O. Henry s'étant fait une spécialité dans la nouvelle, il s'agira de reprendre quatre ou cinq de ses nouvelles à New-York par des réalisateurs de plus ou moins grande envergure et de faire tourner les stars maisons sur de la musique d'Alfred Newman... Pour faire le lien entre ces histoires sans autre rapport que leur auteur, on demande à John Steinbeck de présenter un peu tout ça, l'air de rien, dans sa bibliothèque, avec sa fameuse trogne inimitable...

Dans la première nouvelle, Charles Laughton joue merveilleusement un délicieux clochard qui profite de l'arrivée des premier frimas pour essayer de passer la saison froide aux frais de la princesse et qui essaie désespérément pour cela de se faire arrêter... C'est Henry Koster qui s'y colle, il y avait débat avec le dernier mais on reconnait un peu ses thématiques tout de même, c'est absolument réjouissant, je crois que Laughton est un des rares acteurs à transformer le moindre rôle en oeuvre d'art et à donner envie ainsi de découvrir jusqu'aux plus méconnus de ses films juste pour le plaisir de sa présence incomparable...

La seconde nouvelle raconte une enquête policière, c'est Hathaway qui s'y colle, donc, une histoire un peu filandreuse de flic qui retrouve une vieille raclure ancienne amie, le héros a l'honneur un peu chatouilleux mais à géométrie variable, enfin, pas très grave tout c'est, on s'en fiche un peu de Dale Robertson, ce qu'on regarde c'est Richard Widmark qui reprend le rôle de psychopathe de ses ses débuts, version Carrefour de la mort, avec rire de hyène glaçant au programme et absorption de soupe au croûtons en prime, une petite idée de l'élégance...

La troisième nouvelle se glisse plus vers le mélo, nous sommes dans les quartiers pauvres d'artistes morts-la-faim, il y a deux soeurs (Anne Baxter et Jean Peters, quand même...), l'une séduite puis abandonnée tombe malade, il y a aussi Gregory Ratoff en peintre incompris à l'accent inimitable et c'est absolument merveilleux de voir comme quelques figures hautes en couleur suffisent à désamorcer tous les risques inhérents au pathos. C'est la grande force qu'on devine chez O. Henry d'ailleurs, de souvent passer sur la corde raide sans jamais céder à la facilité de la chute larmoyante. Ici, il est très bien aidé par un Negulesco aisément reconnaissable, le changement de style ne choque d'ailleurs pas du tout, la personnalité de l'auteur suffit largement à la cohérence de l'ensemble...

La cinquième nouvelle offre un petit conte de Noël avec un couple méritant, Jeanne Crain en jeune épouse comblée et Farley Granger en rond-de-cuir aimant, ils ont un de ces vieux garde-manger extérieur en guise de frigo, un quartier rempli de trognes plus ou moins sympathiques et Henry King trousse tout ça avec son savoir-faire habituel...

Non, le problème en fait, c'est que si je compte bien, ça ne fait que quatre nouvelles, là, il en manque une, l'avant-dernière, celle qui est adaptée par Nunnally Johnson, Charles Lederer et Ben Hecht, celle qui devait raconter une histoire forcément savoureuse d'un Oscar Levant kidnappeur, celle qui, enfin, était réalisée par HOWARD HAWKS FOUTREPUTERELLE !!!... et qui participait beaucoup à l'envie d'aller voir ce film, que ce soit dans la cervelle saine de Pruneau ou dans mon cerveau malade et que ça donne furieusement l'impression de s'être fait grugés par une cinémathèque particulièrement muette sur le sujet.

Tous renseignements concernant la disparition de la victime seront acceptés avec la plus grande des reconnaissance.

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le 20 févr. 2014

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Torpenn

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