Film documentaire militant par excellence, La Sociale s'attarde assez peu sur la technique pour nous parler du souffle créateur qui a permis la naissance d'un système de protection sociale commun en France.
Le personnage d'Ambroize Croizat y est certes largement dépeint, mais pas du tout dans une logique uniquement biographique. À travers lui c'est un rapport de forces politique et intellectuel qui s'exprime : celui qui naît de la Libération, avec un patronat discrédité et, au contraire, le PCF au sommet de son influence qui a contribué à gonfler les ambitions du Conseil national de la résistance.
Mais c'est aussi le Croizat lieu de mémoire qui est décortiqué. Si son image a gardé de son éclat dans certains milieux militants, l'image d'un Pierre Laroque, politiquement moins connoté, révèle une rupture dans l'imaginaire collectif entre une vision profondément politique de la chose et une vision plus techniciste. Cette dernière est davantage compatible avec l'héritage du haut fonctionnaire qu'à celle du responsable communiste.
Par le seul jeu du montage, le film montre cette opposition entre d'un côté un ancien responsable syndical qui continue, à plus de 90 ans, à défendre l'institution dans sa ppourquoi ortée politique, et d'un autre côté deux types de profils.
Le premier profil c'est ce qu'ont pourrait appeler les indifférents. Pour eux la Sécu est un élément purement comptable qu'il faut donc préserver en acceptant des sacrifices pour la protéger (c.f. l'interview de Laurent Berger de la CFDT), et qui n'est pas rattaché à un passé communiste, mais à un patrimoine plus consensuel (c.f l'interview de Rebsamen qui évoque de Gaulle).
Le second c'est profil c'est l'ensemble des opposants affichés de la Sécu, comme Dennis Kessler. Pour eux la Sécurité Sociale est un héritage communiste à balayer. Comme ça c'est clair.
Mais finalement l'intérêt de ce documentaire militant c'est avant tout de montrer qu'au-delà des déclarations tapageuses, mais inaudibles, de quelques allumés (comparant la France à la Corée du Nord par exemple…), le principal danger pour la Sécurité Sociale réside davantage dans une sorte d'apathie qui ferait oublier que derrière chaque compromis technique qui peuvent se fait, c'est un projet politique qui se défait. Voilà comment La Sociale appelle à la vigilance.