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Dès qu'on a un film d’animation japonais et/ou poétique, on n’arrive pas à nous sortir autre chose que « on a trouvé le nouveau Miyazaki », bon c’est vrai que c’est marrant d’imaginer Gorō Miyazaki en PLS à chaque fois (le vrai nouveau Miyazaki biologiquement parlant même si la colline aux coquelicots c’est boarf/20) mais ça devient un peu répétitif.


Faut dire aussi que la tortue Rouge l’a cherché, jouant sur la confusion pour son statut confus de nouveau ghibli tout en égrenant ses images d’une poésie folle au compte goutte depuis fin 2015. D’un autre côté elle assume sa différence, on reconnaît la ligne claire à la Hergé (j’ai l’impression que là aussi, tous les articles citent cet aspect) loin du Totoro pourtant attaché à ce robinsonnade. Donc quoi qu’est-ce ?


En fait Ghibli a donné carte blanche dès 2006 à l’animateur Michaël Dudok de Wit (celui qui fait des dessins animés, pas le mec avant un spectacle qui te demande automatiquement de crier plus fort après la première fois qu'il a dit d'aplaudir même si tu viens de te déchirer un poumon et que t'es deux teintes plus blancs). Du coup, point de Miyazaki dans le coup mais une douzaine de dessinateurs à l’ancienne, des années de boulot et une supervision bienveillante de Toshio Suzuki, le mec sans qui des petits trucs comme Ghost in the Shell 2 ou tout simplement le studio Ghibli n’auraient jamais vu le jour.


À ce stade, le film est déjà une anomalie, ensuite viens la direction artistique ; spécialité de Michaël qui a travaillait sur des projets aussi graphiquement barrés que Métal Hurlant et l’enfant au grelot (l’un a signé ma découverte de l’esprit de Noël, l’autre des strings à pointes en cuir). On peut citer son court métrage Père et fille primée à Annecy, poème visuel à l’encre de chine, hautement recommandable, surtout si tu trouves ta vie trop joyeuse et que tu veux déprimer un bon coup. Ici donc inspiration Franco-belge au dessin, peu d’effets à l’ordinateur et un design épuré jusqu’à toucher l’abstraction. C’est beau à en pleurer, ça c’est clair (ligne claire même).


Vient ensuite la narration et c’est la que le bat blesse. Le film est visuellement riche mais épuré, sobre, de même pour son univers musical beau et discret. Mais ce parti, culminant dans le choix de l’absence de dialogue, n’est pas forcément accrocheur. Si à ça on rajoute une certaine lenteur de l’action, le film fonctionnant par ellipse en répétant certaines scènes (donc certains décors) et un aspect de conte philosophique/récit d’apprentissage marqué d’un symbolisme ayant tendance à déstructurer le récit, on se retrouve au final avec 80 minutes bien peu denses qui, si elles restent d’une beauté envoutante, se font parfois sentir. Plutôt n’emportent pas comme peux le faire un Porco Rosso ou une princesse Mononoke.


Attention j’ai beaucoup aimé cette ode à la vie, parfois triste mais toujours magnifique, toutefois j’en attendais probablement trop. La tortue rouge a le charme immédiat d’un court poème mais pas la capacité à faire vivre la grande aventure d’un bon roman.


Reste cette expérience à part, où l’on sent la maitrise de son réalisateur sur chaque parcelle de ce qui est montré à l’écran, mais l’on est peut-être devant une œuvre trop personnelle, que l’on admire sans toutefois réussir à s’y immerger


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le 8 juil. 2016

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