Si il m'était difficile de trouver une quelconque esquive dans l'histoire de Lydia et Krimo, tout autant que graine et mulet dans celle de Slimane, le titre de ce nouveau Kechiche ne pouvait être mieux choisi.

De la vie ? Ce film en transpire. Qu'elle soit sexuelle, étudiante professionnelle, relationnelle ou artistique elle est hyper active.
Déjà car le film raconte plus de 5 ans de cette vie d'Adèle en «seulement» trois heures. Si certains peuvent se venter d'un ratio plus important, qui peut prétendre narrer autant d'une vie avec un rythme aussi posé ?! Un tempo parfait qui nous fait glisser à travers les années sans être trop long ni au contraire trop succinct ou précipité. Aucun raccourci n'est pris dans l'intrigue si bien que des scènes sans récit concret, qui auraient subies une ellipse chez beaucoup, nous racontent là le personnage fragile mais affirmée d'Adèle. Cette mise en scène permet aussi de prendre le temps de peindre la beauté de la vie avec un naturel déconcertant. La musique apporte l'émotion à cette justesse. Idée simple mais géniale que de nous présenter cet instrument de percussion en métal (Hang Drum) en une simple image. Le son est si si agréable et c'est amener subtilement au film. La chanson de la manif est entraînante et tellement légitime dans l'histoire. Je me serais même amusé à faire un jeu de mot avec le titre de cette chanson et le verbe lécher si je le trouvais pas vulgaire.

Ensuite la vie ressort tout le temps de ce film car elle y est véritable. Dans la façon de filmer, de raconter et dans son montage, Kechiche est toujours juste. Il signe des films émouvants car sincères. La confusion entre fiction et réalité est probablement moins troublante que dans l'Esquive ou La graine et le mulet. A dire vrai la polémique a peut-être brisée toute rêverie possible en nous ramenant à la réalité du cinéma. Nous étions prêt à aller voir un nouveau tour du magicien Abdelattif mais on nous a finalement invité au bal du tyran. Il n'est pas de notre rôle de spectateur de songer aux méthodes de fabrication d'un film et à ses conditions, bien au contraire. Nous ne sommes personne pour évaluer une mésaventure dont nous sommes complètement extérieurs. Tout ce que nous pouvons juger c'est le rendu du travail.
Une controverse qui témoignait déjà que la vie viens aussi de l’intérieur du film. L’attachement des actrices et du réalisateur à ce projet faisait tout de même plaisir à voir dans ce brouillard. L'intensité du tournage ne pouvait être là qu'avec la passion et l'envie. Des sensations qui sont forcement positive pour travailler un film. Et effectivement cette engouement se ressent à l'écran. Léa Seydoux est désormais devenu un visage très familiers pourtant c'est fascinant comme elle y est méconnaissable. La transformation n'est pas uniquement physique. Elle se fait dans la voix, dans le regard, bref un numéro d'actrice. Adèle Exarchopoulos elle était inconnue de tous et devrait vite devenit une valeur sûre du cinéma français. Car si l'interprète d'Emma est géniale, la jeune Adèle est ahurissante. Une présence à l'écran saisissante et si rare. Dans toutes les scènes de fin auprès des enfants, elle est d'une crédibilité frappante et touchante. Comme par magie les petits sont eux aussi d'un naturel parfait. Des scènes simples mais extrêmement belles.

Si Kechiche est aussi passionnant en faisant de l'ultra réaliste à la limite du documentaire c'est aussi grâce à sa plume. Il donne à ses personnages des centres d'intérêt intelligents et leur en fait parler joliment, en trouvant toujours des paroliers brillants qu'il emmène au bout de la justesse.

De son éveil à son extase en prolongeant sur un déclin c'est peut-être avant tout du point de vu sexuel que l'on suit la vie d'Adèle. Des scènes très crues qui ne laissent paraître aucune triche mais qui reste dans l’esthétisme. L'érotisme très poussé peut devenir gênant en fonction de votre voisin mais sans aucune vulgarité et probablement bien moins choquant que certaines scènes «habillées». Ne serait-ce que par la légitimité dans le récit. Ces scènes sont l'expression d'une passion mordante. Un nu travaillé comme des tableaux pour mieux refléter les peintures du personnage d'Emma et le sens du mot muse.
adamkesher01
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le 9 oct. 2013

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Adam Kesher

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