"2 chapitres, car il y a deux parties dans Adèle : élévation & chute. Très Zola tu vois, subtile"

Que l'on soit bien clair : je donne 7/10 à ce film uniquement pour la performance extraordinaire de Adèle Exarchopoulos qui rie, chiale, pense, rêvasse, se masturbe, bouffe avec un naturel confondant. Enfin non, pas naturelle, plutôt sans retenue. Adèle est bouleversante, hallucinante, mon petit coeur vibre à l'unisson avec elle pendant ces trois heures qu'elle rend moins longues. J'ai eu envie de fondre en larmes quand elle se fait larguer, j'ai voulu arracher le visage de Seydoux quand elle ne veut pas la reprendre, j'ai eu envie de lui prendre la main et de la consoler à la fin.
Pour le reste, le film n'a vraiment rien à envier. Les autres personnages sont complètement clichés et emmerdants au possible. Et qu'on ne vienne pas me dire "mais si tu vois, c'est fait exprès, c'est pour comprendre qu'Adèle est entourée d'incapables", parce que dans ce cas, c'est un exercice démonstratif des plus pourris. Emma est particulièrement loupée : si son personnage intrigue au début, elle verse rapidement dans l'artiste punk à chien ("ouais mes cheveux bleus et la meuf que je peins et saute sont les signes de mon indépendance d'esprit et de mon emprise sur le monde").
La construction de l'intrigue, elle, est des plus classiques : Adèle rencontre une fille, elles s'aiment trop, ensuite plus du tout, donc elle la trompe, donc c'est la fin. Si il ne s'agissait pas de lesbiennes, tout le monde se serait fait chier au lieu de crier au génie. Depuis quand on traite une histoire d'amour de façon si linéaire? On dirait une amourette de maternelle - je t'aime, à non plus maintenant, tchao bye.
J'en veux aussi énormément à Kechiche d'avoir juger bon d'en rajouter un max niveau lutte des classes : Adèle est pauvre, donc ses parents ne mangent que des pâtes et regardent la télé. Emma est -non pas riche, mais bourgeoise, parce que lutte des classes tu vois- donc c'est une artiste, ses parents mangent des huîtres et collectionnent l'art. Boring, ridicule, cliché. Le film en devient super lourd, Adèle doit se demander ce qu'elle fait dans cette galère.
Deux- trois autres remarques. Hyper lourd aussi de faire défiler Emma et Adèle à la Gay Pride, de les faire rencontrer dans un bar ultra-lesbien (genre si tu n'as pas les cheveux courts et deux meufs à embrasser tu ne rentres pas), de les faire baiser dans un style hyper-violent, type défonçage de base (vouloir casser le mythe qu'entre filles, c'est forcément doux et bisounours, c'est bien. Le transformer comme Kechiche le fait en massacre de chatte, c'est nul. Une fois de plus, il manque de savoir-faire en terme de demi-mesure). Autre détail, mais juste pour critiquer : aucun ado de lycée popu ne boit de Corona dans les manifs. C'est quasiment 10€ le pack, autrement dit un luxe quand on a moins de 18 ans. Pour quelqu'un qui veut tant taper sur le bourgeois, on appelle ça comment? Un manque total de crédibilité?