Après des mois de tumulte médiatique avidement relayé sur Internet, de critiques justifiées ou injustifiées sur les conditions de tournage et le comportement du réalisateur, La vie d'Adèle sort sur nos écrans de cinéma permettant enfin au spectateur de se faire sa propre idée du dernier film d'Abdellatif Kechiche. Je ne parlerai pas donc des tensions qui règnent autour de la sortie, ayant eu pour point d'honneur de revenir à l'essentiel : le film.

Depuis son premier passage derrière la caméra avec La faute à Voltaire, sorti en 2000, Abdellatif Kechiche s'est imposé comme un portraitiste moderne. Sa capacité à filmer le réel, à peindre le quotidien de personnages blessés et marginaux font de lui un réalisateur à part dans la sphère du cinéma français. Le cinéma d'Abdellatif Kechiche s'intéresse au détail, dans un souci constant de se défaire des étiquettes collées sur les gens différents par peur ou par méconnaissance. Qu'il s'agisse des sans-papiers (La faute à Voltaire), des jeunes des cités (L'Esquive) ou encore d'ouvriers maghrébins (La graine et le mulet), Kechiche a à cœur de filmer des tranches de vies, des moments qui, lorsqu'on l'on s'y attarde sont mis en images avec une justesse qui nous ferait presque oublier que nous sommes en train de regarder un film de fiction.
Avec La vie d'Adèle, le réalisateur s'est penché sur l'adaptation de la bande dessinée de Julie Maroh, Le bleu est une couleur chaude. Le sujet s'inscrit à nouveau dans la réalité. Celle du milieu homosexuel français, marginalisé et souffrant malheureusement encore de préjugés (qui sont à l'image des remarques homophobes que reçoit Adèle au lycée). Le film a eu la chance d'être présenté au moment du passage de la loi en faveur du mariage homosexuel et s'est donc un peu plus ancré dans cette réalité sociale ce qui a sûrement favorisé sa place au palmarès cannois.

Car quoique dise Kechiche, La vie d'Adèle conte une histoire d'amour qui n'est pas anodine dans le paysage cinématographique français. Cette histoire d'amour lesbien entre la jeune Adèle (Adèle Exarchopoulos), issue d'un milieu modeste et l'artiste peintre Emma (Léa Seydoux) est unique et intrigue. Pour preuve, le nombre de personnes présentes le jour de sa sortie en salle, venus découvrir enfin qui est Adèle et partager silencieusement son aventure amoureuse durant 3 heures.

Dès le début du film nous sommes happés par la présence de la jeune Adèle Exarchopoulos, noyés dans son regard triste et plein de questionnements. Kechiche force le trait, multiplie les gros plans et la suit dans son intimité la plus profonde : dans son sommeil, durant ses longues pérégrinations dans les couloirs du lycée et jusqu'à ses moments de découvertes et d'initiation sexuelles avec Emma. Les scènes de sexe filmées, si elles sont un peu longues et témoignent avant tout d'un exercice de style pour le réalisateur, ne sont ni malsaines, ni trop complaisantes. Je tiens à faire cette parenthèse car il est tout de même un peu triste de voir que ces rares scènes « crues » servent d'argument de vente au film qui a beaucoup plus à offrir. Passons.

La suite de ma critique ici : http://www.cine-region.fr/films/la-vie-d-adele-chapitres-1-2
SarahLehu
8
Écrit par

Créée

le 17 oct. 2013

Critique lue 429 fois

3 j'aime

Sarah Lehu

Écrit par

Critique lue 429 fois

3

D'autres avis sur La Vie d'Adèle - Chapitres 1 et 2

La Vie d'Adèle - Chapitres 1 et 2
OEHT
10

Tomber amoureux

Une fille sort de chez elle au petit matin, s'éloigne dans la rue en remontant son pantalon puis se met à courir pour attraper son bus. Dans le train qui la mène au lycée, elle s'endort et nous...

Par

le 9 oct. 2013

240 j'aime

38

La Vie d'Adèle - Chapitres 1 et 2
guyness
5

Terre Adélie

Alors, je précise d’emblée que pour pouvoir apprécier la vie d’Adèle, il faut pouvoir mettre de côté deux ou trois détails qui pourraient agacer: le fait que sur près de 30 personnes qui ingurgitent...

le 19 févr. 2014

157 j'aime

29

Du même critique

Hippocrate
SarahLehu
7

Critique de Hippocrate par Sarah Lehu

Qui n'a jamais entendu autour de lui des anecdotes drôles, crues, surprenantes et émouvantes sur la médecine ? L'hôpital est nul doute l'un des lieux les plus représentatifs de la société et c'est...

le 10 sept. 2014

7 j'aime

2

Il était temps
SarahLehu
3

Critique de Il était temps par Sarah Lehu

Dix après la réalisation de sa première comédie romantique Love actually et après un passage dans le monde déjanté des radios pirates rock n'roll de Good Morning England (2009), Richard Curtis...

le 20 nov. 2013

7 j'aime

1

Gravity
SarahLehu
4

« Ma bouze oui, mais dans l'espace et en 3D »

Un mot sur « l'époustouflant Gravity » le chef-d'oeuvre incontesté et incontestable de la décennie voir du siècle si l'on en croit certaines critiques dithyrambiques... Que les choses soient claires,...

le 30 oct. 2013

7 j'aime

6