La soumission mentale chez les socialistes

Au premier abord, voilà un film très émouvant au propos tragique. Cette histoire m'a bouleversée, en tout cas pour la pauvre petite Adèle, que l'on voit totalement égarée et qui finira par retourner à l'équilibre (sans doute après le film) - et accessoirement à une orientation sexuelle normale. En effet le problème n'est pas là et son homosexualité n'est jamais qu'un mirage pour cacher son vrai malaise existentiel.

En même temps c'est aussi un film démagogique destiné à la bourgeoisie et à ses esclaves qui rêvent d'en faire partie. Il faut arrêter deux secondes. Même s'il est contre moralement, le réalisateur admet que la copine d'Adèle, Emma, lui est supérieure intellectuellement. Elle serait plus complexe, d'où des désordres moraux ou une absence de fiabilité tout à fait légitime puisque son milieu l'exige et est au-dessus des petites considérations.

Elle cherche le grand amour avec une grande personne, or Adèle n'est qu'une petite plouc de rien du tout. On voit aussi que l'homosexualité, comme les teintures foireuses et les postures artistiques à la con est plus facile à vivre dans un milieu aisé. Adèle est une gueuse ordinaire et chez les péquenauds des villes comme des champs on aime pas trop les fantaisies de ce genre : c'est même pas qu'on aime pas, c'est que ça n'a pas sa place et quand ça surgit, c'est WTF.

Là où je suis mitigée c'est que le film donne raison à la condescendance envers Adèle, justifie qu'elle aille dans le mur et pose effectivement l'univers d'Emma comme supérieur y compris d'un point de vue moral. Abdellatif Kechiche a eu des conflits avec Léa Seydoux et dit qu'elle est « née dans le coton » ; son cœur est clairement du côté du personnage d'Adèle. Or il l'abaisse constamment.

Ça s'appelle du misérabilisme et c'est peut-être efficace pour émouvoir mais c'est malhonnête et surtout contre-productif si on veut soutenir quelqu'un ou quelque chose. Pourquoi Adèle resterait cette fille un peu conne sous prétexte qu'elle vient de chez les gueux ? Nous sommes donc condamnés à être médiocres si notre position sociale l'induit ? Les pauvres sont forcément bêtes et pathétiques ? Les riches peuvent être grotesques tant qu'ils veulent, de toutes manières leur supériorité intrinsèque reprend toujours le dessus ?

Voilà l'endroit du malaise pour moi. Kechiche a certainement une fibre sociale très développée mais il pense comme un esclave, avec les clichés que lui fournissent ses adversaires : et en plus il les honorent.