Le film de Billy Wilder souffre incontestablement de sa production. Le réalisateur de quelques chefs-d’œuvre majeurs du cinéma américain avait, en effet, une idée générale que les producteurs ont finalement refusé de suivre. D’une durée initiale de 2h45 (le premier montage durait même 3h20) avec plusieurs chapitres racontant différents épisodes liés entre eux, le film a finalement été ramené à 2 heures. Pour ce faire, les producteurs ont effectué eux-mêmes les coupes, conservant deux segments.


De ces choix découle un évident manque d’unité même si la thématique entre les deux épisodes est conservée, à savoir le lien entre Sherlock Holmes et les femmes. On pourra principalement reprocher au film la faiblesse de son premier segment, long de 45 minutes, hésitant entre la farce (les liens entre Holmes et Watson, la mésaventure de Watson à l’opéra, la proposition faite à Holmes, etc.) et la tragédie (celle d’un homme qui trompe son ennui entre cocaïne et expériences incongrues quand son intelligence est mise au repos forcé). Cette partie, pour le coup, n’est pas pour tous les publics et a de quoi rapidement décourager les simples amateurs d’histoires mystérieuses propres aux aventures du célèbre détective.


La deuxième partie qui raconte une enquête à la Sherlock Holmes est bien plus convaincante. Elle permet ainsi à différents publics d’y trouver son compte. Même si elle est marquée par un cynisme certain qui n’est pas déplaisant, loin de là, car c’est aussi un des propos du film, Billy Wilder mélange avec malice les genres et entraîne ses personnages dans une drôle d’aventure. Si l’intrigue n’est, au final, qu’un prétexte pour brosser le portrait de ses différents personnages et aborder différentes thématiques, on se laisse agréablement embarquer, surtout après avoir autant souffert en début de séance.


Bien filmé, bien photographié et interprété, le film dévoile peu à peu toute sa subtilité et son intelligence, même si le lien avec la première partie, qu’on finit par espérer dans le développement de l’intrigue, n’arrive jamais. Pas exempt de mélancolie, d’humour et de fantaisie, le film donne à voir un portrait original du célèbre détective privé en mettant l’accent sur ses zones d’ombre, le premier segment du film trouvant là enfin son éclairage. Il est aussi et surtout une joyeuse charge cynique sur différents mythes, Sherlock Holmes, bien sûr, en tête, mais aussi, plus inattendu, le monstre du Loch Ness himself.


S’il faut être patient avant de le trouver réellement distrayant et pertinent, le film peut prétendre atteindre tous ses publics, à savoir ceux qui aiment le locataire du 221B Baker Street et les fans de Billy Wilder. On pourra cependant comprendre (et c’est bien dommage) qu’au bout d’une demi-heure, certains, croyant avoir été trompés sur la marchandise, aient lâché l’affaire.

Play-It-Again-Seb
7

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le 7 janv. 2021

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