Je me suis endormi devant "La Vie rêvée de Walter Mitty": mes yeux se sont fermés au moment où Ben Stiller (Walter), après une longue traversée de l'Himalaya, rencontre Sean Penn, qui joue le rôle d'une sorte d'anachorète. Avant cette ascension vers les sommets (l'endroit où se trouve le Sage), le film suivait déjà depuis un certain temps une mauvaise pente, comme si la réalisation effective de la "vie rêvée" de Walter - ce besoin éprouvé un jour par le personnage d'écouter ses envies profondes et de partir à l'aventure "all around the world" - faisait basculait le film vers le pire: une rêverie écolo au bord des fjords islandais, puis, une rencontre avec un chaman (Sean Penn) sorti d'un roman de Paulo Coelho. La Vie rêvée de Walter Mitty, c'est donc la rencontre de Ben Stiller et de "L'Alchimiste".
Avant de partir à la recherche de sa "légende personnelle" (pour reprendre l'expression un peu toc de Paulo Coelho), Walter tombe amoureux d'une de ses collègues (Kristen Wiig) et se cherche, en même temps, un but dans la vie. Walter est une synthèse de tous les personnages incarnés par Stiller, c'est le côté "best of" du film: on pourra y retrouver par instants l'amoureux transi et maladroit de "Mary à tout prix", l'homme qui n'arrive plus à avancer dans sa propre vie ("Greenberg"), le gardien d'un sanctuaire qui s'anime sous nos yeux, comme dans "Une Nuit au musée" (voir la séquence où il sort d'une cover du magazine Life).
Walter saute ensuite dans un hélico et c'est parti pour la grande aventure. La vie "rêvée"? De quels "rêves" parle-t-on exactement? Est-ce que tout le monde a envie de se ressourcer en Islande en faisant du skate au bord des fjords? Est-ce que tout le monde a besoin de faire l'ascension de l'Himalaya pour trouver LA réponse?
Comme l'a confié Kristen Wiig à Laurent Weil au moment de la sortie du film (désolé pour la source), "nous sommes tellement connectés à nos téléphones, nos ordinateurs, que parfois nous ressentons le besoin de nous déconnecter; on n'est pas non plus obligé de voyager jusqu'au Groenland pour ça." En effet. Dès lors, pourquoi nous infliger une telle odyssée? Et pourquoi a-t-on droit à tous ces plans de paysages filmés comme des fonds d'écran?
Très loin de la grande évasion promise par son titre (un titre finalement un peu douteux, qui évoque les "fabuleuses" histoires de Jean-Pierre Jeunet), La Vie rêvée de Walter Mitty est film dont je suis sorti désolé. J'ai tellement aimé Ben Stiller par le passé que j'aurais voulu qu'il entende ce que lui dit Kristen Wiig à propos de Space Oddity de David Bowie: "This song is about courage and going to unknown". Du courage, de l'inconnu, Walter, c'est tout ce qui manque à ta vie.