Un très beau film, qui montre que toutes les tragédies que traverse notre monde ne sont que des voyages dans le temps, que les livres accompagnent, imprimés d'une encre de couleur, celle qui coule dans nos veines, et qui crée notre histoire. Une leçon qu'on a écoutée se taire et qui n'a pas changé depuis l'homme. Que l'on découvre un jour, horrifié, sur tous nos bancs de l'école, lorsqu'elles existent bien sur. Et constaté des années plus tard, que la réalité n'est qu'obscurité et lumière, un cycle de vie que développent nos racines barbares. Mais aussi d'espérance, quand soudain l'esprit renaît de sa clarté, pour très vite retourner parmi ces longues nuits de cauchemar, aux supplices qu'il fallait pouvoir enterrer.

Ce film permet de comprendre tous cela, de mettre en perspective un récit qui, après une période passée, revenir dans ce camp en 1995. Sous protection de l'ONU, et voir la chute de SREBRENICA s'organiser, des milliers de musulmans Bosniaques déportés, pour finir en Génocide.

Comprendre l'incompréhensible, l'abandon, un conflit bien trop loin, et pourtant si proche, en dehors de tout. C'est une réalisatrice de talent, Jasmila Zbanic qui ne cherche pas seulement à émouvoir, mais aussi à raconter à la façon presque d'un documentaire une vérité qui parfois peut se mêler à des moments de fiction. Sûrement pour le bien d'un scénario, qui dans l'ensemble reste une réussite à la fois sur le plan technique, que des comédiens. Une expérience accomplie dans ce camp, dure et intense, au regard acéré. Une tension qui ne cesse de monter, pour nous montrer l'absurdité de la guerre, des voisins qui s'entretuent subitement, et qui devient en peu de temps, cette sordide armée serbe que Aida ( Jasna Duricic ) voit défiler, et sa voix disparaître. Quand s'ouvre les barrières au premier coup de pression, devant ces casques bleus en short, un commandement néerlandais qui promettait pourtant protection. Sous la chaleur d'un soleil qui suppliait eux aussi de l'aide.

C'est alors une tragédie qui débute, complice devant l'histoire, lorsqu'il n'y a plus de dialogue possible et qu'il est temps de fuir. Sauver sa famille, son peuple qu'elle ne peut plus retenir. L'espoir d'y croire, oublié la terreur que l'on lit dans leurs yeux. Un territoire qu'ils pénètrent maintenant que tout le monde est aux abonnés absents. Des monstres sanguinaires, assoiffés de sang, se rappelant des méthodes qui rassurent et qui distribuent des bonbons et de gentils

morceau de pain à tous ses grands enfants qu'il fallait aussi savoir apaiser. Afin de tout recommencer, tout réinventer, sur une terre qui les divise, une religion qui les éloignes. Et voir ce rêve qui s'efface brutalement, face à la froideur de ces visages qui pénètrent doucement tous ces corps, que l'on s'épare, devant un tel projet diabolique. Celui d'un meilleur nettoyage ethnique, dans l'objectif d'une Grande Serbie. Tous ces damnés de l'oubli, pour qui cet arrêt sera le dernier, quand plus personne ne veut entendre, et que d'autres comprennent qu'il est nécessaire parfois de savoir faire de la politique une idée. Ne plus subir, tétanisé face à l'événement, sur un continent que l'on appelle l'Europe, où l'ONU se questionnant bien trop tard devant une telle paralysie.

Et cette fin, où la joie de vivre reprend en toute impunité, et qui nous pousse a réfléchir sur tous ces massacres. La nature qui expérimente les catastrophes, des historiens qui contestent, et surtout ce mémorial de Srebrenica qui existe. Un moment de silence qui réunit des innocents, afin qu'ils puissent enfin reposer en paix, pour toujours.

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le 12 janv. 2024

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John Rolex

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