Déserts poussiéreux, villes abandonnées, fantomatiques, chaleur suffocante, végétation sèche... Le décor est planté. Il flotte dans l'air comme une odeur de guerre sans fin, comme le parfum palpable d'un pays qui s'écharpe, divisé et exsangue. Entre bleus et gris, rien ne va plus. Et entre les deux, des cavaliers solitaires, des têtes mises à prix, des patates à l'eau et un gros paquet de fric.

Le bon, la brute et le truand pourrait qualifier le même homme, tiraillé entre le désir de survie, l'appât du gain et le besoin de justice perpétuelle. Dans le film de Leone, ils sont trois. Le Truand, Eli Wallach (le plus saisissant des trois, parfait même en arrière-plan), n'est autre qu'un looser chanceux et bon tireur. Son bagou et sa bonne bouille le mène à faire affaire avec Clint Eastwood, alias le Bon, personnage typiquement mystérieux des westerns de haute volée. Qui est-il ? D'où vient-il ? Nul ne le sait, mais il doit traîner un sacré bagage car il plisse toujours les paupières comme si le sable du désert lui picotait les yeux en permanence.
A eux deux, ils représentent le plus beaux duo d'ennemis intimes jamais conté. Je t'aime, moi non plus, jusqu'au bout. Jouissif, parfois hilarant (« Don't die Blondie ! Don't Die ! ») et toujours, toujours, absolument juste.

A leur côté, en retrait, se planque le mal nommé français « La Brute » dont je préfère de loin le titre original The Bad. Le Bad Guy par excellence qui prévient chaque exécution d'une réplique cinglante et rit tout seul une fois sa victime alourdie de quelques plombs. Pour moi, il est la classe suprême, personnifiée par Lee Van Cleef, particulièrement par son regard d'oiseau de proie.

L'histoire est simple : ils sont trois à savoir où sont cachés 200 000 dollars de pièces d'or. Seulement voilà, 200 000 divisé par trois, ça fait toujours moins que 200 000 divisé par rien. Tel un entonnoir implacable, le film va alors rapprocher ces trois hommes au centre d'un cimetière, revolver à la ceinture, en une scène éblouissante de perfection. Je n'en dis pas plus.

La réalisation de Leone, tout à fait reconnaissable bien entendu, est réjouissante, entre plans séquences (mais beaucoup moins que dans « Il était une fois dans l'Ouest »), gros plans, plans serrés, zooms, tout cela dans un montage particulièrement soigné.
J'ai vu la version dite longue, restaurée, et je pense qu'il n'y a rien à ajouter quand un film de 3H ne vous donne pas envie de faire une pause pipi.

J'aurais beaucoup à dire mais je sors tout juste du film donc je manque un peu de recul pour rassembler mes idées. J'ajouterai donc juste un mot sur la musique de Morricone, un des ingrédients principaux qui vient fixer ce film à tout jamais au panthéon des plus grands. Telle la vinaigrette d'une salade (comparaison de bouffe, ça me manquait), elle est le liant de chacune des scènes, chacun des plans, chacune des répliques. Elle est le ciment du film.

Cela faisait longtemps que je n'avais pas été aussi enthousiasmée par un film. Encore une fois, je suis particulièrement contente d'avoir attendue. Découvrir une œuvre pareille, c'est comme sa première fois, on a envie que ça arrive vite mais une fois que c'est passé, ça ne sera plus jamais pareil. Il faut parfois faire preuve d'un peu d'abstinence.

Top10 of course.
Before-Sunrise
10
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le 22 nov. 2011

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Before-Sunrise

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