Le Wuxia pian a connu un succès dans le cinéma grâce aux écrits historiques et le genre est remis au goût du jour dans les années 1965 par les studios chinois Shaw Brothers. Au cinéaste Cheng Cheh de leur proposer une revisite par sa trilogie sanglante, innovante en son temps et caractérisée par le nombre de tués, avec pour héros un guerrier à un seul bras mais capable de les tuer tous, donc, quel que soit l'opus visionné.
On retrouve l'acteur Jimmy Wang Yu, pour cette seconde aventure, le visage mutique à la sombre réflexion, qui s'est rangé des armes. Les femmes bien en peine d'avoir des rôles importants, ne seront que représentation formelle, l'épouse par sa présence, signe la fin des combats et le repos du guerrier pour Fang Gang, qui devra encore une fois, faire preuve de tout son talent pour aider les écoles de sabre mises à mal par un groupuscule à la volonté assassine et aux noms évocateurs : Grande Force, Long Bras, Roue Tranchante, Illusion Céleste, Boudha de l'Enfer, Dragon Vénimeux, Mille Doigts, et le Roi sans Forme, leur chef, pour le duel final comme il se doit.
Fang se battra avec ces affreux personnages les uns après les autres -mais une fois seulement que ses nouveaux amis, particulièrement enclins au sacrifice, auront subi la foudre meurtrière- réglant l'affaire en quelques coups de lames bien senties. Il terrassera avec une facilité déconcertante, une jeune femme perverse au doux phrasé et à l'esprit fourbe n'hésitant pas à flirter allègrement avec ses futures victimes, et Ti Lung, figurant, en subira les conséquences. On retrouve également avant son rôle dans le dernier opus, David Chiang qui ne fera que passer lui aussi.
Fang finira par les tuer tous, d'un seul coup de sabre, même de loin, et rentrera enfin chez lui, foulant au pied son titre de meilleur sabreur de tout les temps, dégoûté de tant de violence...
Volant littéralement, des toits aux troncs de bambous, restant en l'air un court instant, la technique n'est pas encore au point et signe le début de ces effets virevoltants que l'on retrouvera plus tard dans le genre avec une plus grande maîtrise, mais qui réserve quelques chorégraphies inventives.
L'utilisation de toute arme, du filet, au poignard, de mains gantées aux griffes acérées ou de lancés de sortes de gros enjoliveurs crantés, en passant par les effets magiques, poudres empoisonnées, sabres qui rallongent, les situations ne manquent pas d'originalité et de dynamisme, pour peu que l'on passe sur les dialogues et que l'on ne soit pas trop tenter à souffler aux combattants que l'ennemi est juste derrière lui, là, bien visible et en nombre...La multitude des situations n'est que prétexte pour l'action en déclinant les différents environnements et décors kitsch avec les combats qui vont avec...Les gentils sont propres et habillés de blancs et les méchants de noir, à la mine patibulaire. Et le plaisir que le cinéaste semble prendre à faire tomber les combattants, se roulant allègrement dans la poussière pendant quelques secondes, à rester immobiles dans des positions inconfortables et à retomber dans un râle de mort qui aura pris son temps. Arrêt sur image.
Peu de psychologie, des jeux d'acteurs inégaux et des bruitages excessifs, que ce soit les bruits de pas sur le sol, ou les cliquetis d'armes, ou du son des lames au contact de l'air, sont redondants et se répètent sur les trois films. Même genre de combats, même déclinaison de situations, même si un seul bras les tuera tous, sera le plus scénarisé par une meilleure évocation du cheminement de Fang... Le bras de la vengeance prend une direction plus franche dans le délire combatif avant l'apothéose que sera la rage du tigre.
Mais quelle rigolade il faut bien le dire. Un plaisir de visionnage par ces découvertes d'un cinéma qui ne lésine pas sur les pots de peinture, son graphisme marqué, et sur son décalage entre l'action pure et la dénonciation de la violence.
La rage du tigre restera finalement le meilleur de cette trilogie, avec un cheminement désespéré clairement exprimé, dans une société où la condition de l'homme est soumise à sa capacité de combat, et se révèle bien plus percutant. Une ambiance qui rappellera aux westerns désœuvrés des années 70. En laissant un peu de côté l'aspect romanesque, tout autant léger que mièvre des deux opus précédents, il opte pour appuyer encore un peu le bouchon avec cette particularité à l'époque d'annoncer dans les rapports amicaux l'attirance masculine. On remarque aussi ses deux acteurs David Chiang et Ti Lung bien plus inspirés.


A voir pour tous les amateurs du genre.

limma
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le 27 nov. 2019

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