Kurosawa n'est pas le premier à s'atteler à l'adaptation d'un des plus célèbres drame de la culture mondiale, et il ne sera pas le dernier non plus. Mac Beth avait déjà fasciné le grand Orson Welles, qui adaptera également Othello. Si Orson Welles se veut très fidèle, Kurosawa prend quelques libertés. Ce que l'on comprendra aisément, étant donné qu'il en transpose l'intrigue dans le Japon médiéval.
Ainsi les trois sorcières, inspirées des Parques de la mythologie grecque, annonçant leur fatale prophétie à Mac Beth (ici Washizu) et son fidèle ami (Banquo devenu Miki) sont ici remplacées par une sorte d'esprit de la forêt qui se rattache à la mythologie nippone. Le cadre de cette scène est donc remplacé ici par une forêt brumeuse et labyrinthique propice aux hallucinations. S'agit-il d'une hallucination? La question reste en suspens. Car si la prophétie se réalise ce n'est pas à cause d'un destin qui serait écrit, c'est à cause des actes de Washizu, encouragé par son épouse arriviste.
Kurosawa prend également la liberté de modifier la fin de l'histoire pour proposer une version plus symboliste. Au lieu de périr de la main vengeresse de son ennemi, le héros meurt empêtré dans une sorte de toile d'araignée, acculé de toute part, seul contre tous. Ceci dans une séquence mythique, d'abord haletante, mais qui finit par trainer en longueur.
Pour camper son Mac Beth, Kurosawa fait de nouveau appel à son fidèle Toshiro Mifune qui semblait taillé pour ce rôle de capitaine rongé par l'ambition qui finira par sombrer dans la folie. Qui mieux que lui sait prendre cet air halluciné et ces yeux de fou lorsqu'il comprend sa perte. La performance de Mifune est une des plus captivante de l'histoire du cinéma.
L'intensité dramatique est bien présente, mais le film souffre de quelques longueurs, notamment sur la scène finale, qui plombent le rythme. Kurosawa, que j'adore, se montre cette fois trop caricatural, avec une mise en scène grandiloquente, voir prétentieuse. En ce sens son adaptation du Roi Lear (Ran) est plus réussi, bien que très théâtral elle ne tombe pas dans une sorte de grandiloquence excessive. Je sais, je fais la fine bouche, mais on est en droit de demander beaucoup à un film de Kurosawa. Un de ces cinéastes qui font des grands films même quand ils font des films moyens.