Un réalisateur de la contemplation, du long silence (quitte à forcer un peu) et de la sensualité doucement amenée. Un pitch lapidaire. On va voir le colocataire en sachant à peu près à quoi s'attendre.
Le colocataire ne trompera personne, il offre son lot de belles images, ses moments forts, et tous ces riens qui font parfois du sens, mais aussi parfois des longueurs.
La dimension sociale est présente et pèse sur la relation. Si cette colloc ne semble pas si habitée au quotidien, elle accueille beaucoup d'amis ou de relations de passage qui poussent les personnages à la réserve au point qu'on soupçonne par moments qu'ils s'embêtent autant que nous. On est pas allergique aux scène de plateaux TV, mais leurs répétions, si elles font leur œuvre pour nous faire vivre en tant que spectateurs l'expérience de la colloc, s'avèrent quand même un peu rébarbative.
Heureusement le film offre aussi ses beaux moments. Dans les coups d'œil furtifs, la sensualité d'un premier contact, ou dans un regard désabusé, Marco Berger est dans un domaine qu'il maîtrise totalement, et toute la trame du film (qui reste simple sinon simpliste) se fondera sur ces moments pour avancer, avec une grâce certaine.
On retiendra donc longtemps certains plans très réussis, certaines pièces de la collocation habitées tantôt de passion, tantôt de solitude. Autant qu'on oubliera vite des personnages peu épais dès qu'on sort de la relation qui les lie. Quotidien generalement expédié par quelques plans avec la famille ou au boulot (il fallait entendre les spécialistes de la spécialité s'ébahir du fait que le film parle d'ouvriers, rendez vous compte ... si les acteurs sont plus crédibles que Catherine Deneuve dans Dancer in the Dark, on est pas non plus devant un Ken Loach...). Dans ce quotidien s'insère évidemment la copine d'apparat, par qui fatalement la conclusion arrivera.
Une fois n'est pas coutume, et sans spoiler, cette conclusion nous donnera néanmoins le sourire, reussissant l'exploit de nous faire apprécier un personnage traité jusque là comme un affectueux parasite, et en donnant la leçon de courage et d'affirmation qui font partie du cahier des charges du cinéma gay.
Je ne sais pas si ce cinéma gay existe encore, si il fait toujours sens, ou si il se justifie au delà d'une clientèle cinéphile qui a besoin de se voir en miroir de temps en temps, dans un océan de romances hétérosexuelles bien normées. Mais alors pourquoi toujours nous montrer la même chose ? Peut-être que le cinéma gay a besoin de nouveaux combats politiques forts, comme certains militants y appellent. Mais en attendant, il se répète et ne surprend plus beaucoup.
De là à se refuser une sucrerie douce amère de temps en temps ? Certainement pas, et le colocataire est un bon choix, d'où ma note, bien que sans surprise.