Un bon film... qui m'a laissé de marbre

Avant de lancer le film, je m'étais préparé à voir un film utilisant un style graphique radicalement différent. Le style proche de l'estampe était particulier mais pouvait se révéler beau et si j'avais des craintes avant de lancer le film, je me disais que la "patte" du film n'en ferait pas partie. Après tout, la "patte" de Persépolis par exemple ne m'avait à aucun moment empêché de partir avec le film de sa première à sa dernière image.
J'avais peur d'un film qui confonde contemplation et stagnation, j'avais peur d'un film qui se regarderait lui-même, j'avais peur d'une histoire inutilement misérabiliste.

Et au final, rien de tout cela.

Le Conte de la Princesse Kaguya se révèle être un très joli film avec une histoire agréable à suivre, contemplative mais engageante et des personnages que l'on prend plaisir à voir évoluer.
Le conte est joli, pétri de morale bouddhiste, ce qui apporte un vrai changement même dans les habitudes des cointes animés japonais (souvent shintô).
Mais au final, le film s'est révélé totalement dépourvu d'émotion, comme désincarné. Ce qui m'embête le plus c'est que je sais que la source de ce problème ne vient pas du film ou de son réalisateur. Non, ce sentiment vient purement et simplement de moi.
Car au final, ce qui m'a toujours laissé légèrement à l'écart, ce qui m'a systématiquement fait ressortir du film quand je commençais à vraiment m'y plonger, c'est l'élément même auquel je n'aurais pas pensé, parce que je m'étais justement préparé à ne pas le laisser influencer mon visionnage :
Le graphisme.

Oui Takahata a voulu se rapprocher du graphisme d'une estampe et oui, l'animation est d'une finesse impressionnante. Mais ce graphisme m'a peu à peu totalement exclu du visionnage comme si, à chaque fois que mon esprit commençait à se plonger dedans, mon cerveau le rappelait à l'ordre
"bof, après tout ce n'est qu'une image"
Comme tout film animé ou non, certes, mais pour la première fois (pour un bon film), j'avais cette pensée obsédante qui me distançait à tout instant.
En effet, le graphisme fait penser à une estampe. Ce sont des estampes. Et ce n'est jamais devenu plus à mes yeux. Je regardais une suite d'estampes, un peu comme le rouleau peint que Kaguya déroule dans sa demeure. C'était joli mais immobile, figé.
Cette impression a (à mon plus grand bonheur) un temps volé en éclats lors de la fuite de Kaguya pendant la cérémonie où d'un coup le dessin devient fou, incroyablement dynamique, tout virevolte, se couvre de couleurs et pendant un temps, j'ai vraiment adoré ce que je voyais. Pour la première fois je suis parti avec le film, bien décidé à y rester accroché cette fois. Et puis toute cette scène s'est révélé

et mon point d'accroche au film s'est cassé de nouveau.
A la toute fin, à nouveau une autre scène m'a repris avec elle.

Mais le film touchait à son terme et il était alors trop tard pour moi. L'absence totale d'émotion de la scène finale n'ayant rien fait pour corriger cela.

Au final j'ai donc regardé ce film "de loin", sans déplaisir aucun, et en y trouvant pas mal d'intérêt, mais sans jamais réellement être pris par l'œuvre. En fait, jamais une œuvre animée n'avait autant fait d'efforts pour me tenir à l'écart d'elle alors que je faisais tout pour m'y plonger.
La dernière scène résume en cela parfaitement mon point de vue sur le film

Le Conte de la Princesse Kaguya est un film à voir, justement pour son parti pris graphique et pour son traitement original. Mais tout en gardant à l'esprit que ce parti pris pourrait totalement vous tenir à l'écart. Et que vous ne pourrez alors rien y faire.
Et que ça ne l'empêche en rien d'être un bon film.

Une autre oeuvre qui viendra compléter cette liste des "films que je sais être bons mais qui me laissent totalement froids"