Si Le Convoyeur surprendra dans les deux sens, j'aurais tendance à pencher vers la bienveillance eut égard à sa mise en scène économe et chirurgicale. À contre-courant du découpage multi-angles souvent injustifié, Nicolas Boukhrief mettra l'essentiel en un plan là où d'autres confondent sophistication avec frénésie. Par ce biais, il rappelle combien l'atmosphère est d'abord une question de temps et de perspectives. En dix minutes, le cadre est posé : froid et précis, la mécanique d'un polar est en marche, une menace sourde lui colle aux basques. L'attaque semble inéluctable, reste à savoir où et quand.
Le qui et le pourquoi ne sont pas les priorités hélas. Par conséquent, ils seront les points faibles ici. Ce qui semble d'autant plus surprenant que le soin appliqué à l'ambiance prêtait le flanc à un jeu de pistes/indices/faux-semblants. Manifestement, et c'est regrettable, le film ne cherche jamais vraiment à jouer sur cette corde. Avec le parterre de gueules à la distribution (Albert Dupontel, Jean Dujardin, François Berléand, Philippe Laudenbach, Julien Boisselier), la partie recelait pourtant de superbes promesses. Ce choix dramaturgique me semble ici jouer contre le long-métrage, puisque les motivations d'Alexandre (Dupontel) sont dévoilées à mi-parcours. Il ne restait donc que ce point à éclaircir. Je m'interroge également sur le personnage de la voisine (Aure Atika), dont l'utilité me paraît minimal voire inexistant.
Heureusement, Le Convoyeur a encore une belle cartouche en réserve, toujours au crédit de sa réalisation : les séquences d'action. Notamment dans sa résolution, le long-métrage ouvre les vannes à la tension et au spectaculaire. Les affrontements sont racées, abrupts et impitoyables. La violence surprend par sa sècheresse, sans jamais altérer le montage chirurgical. Ce qui impose le respect, surtout que les risques à sombrer dans la surenchère était élevés. Avec un meilleur agencement de son récit, on aurait pu tenir un précis du polar français. On était pas loin, mais c'est déjà bien tenté.