Après avoir largement œuvré dans l'épouvante pure et dure, Roger Corman continue d'adapter Edgar Allan Poe mais change toutefois de registre. S'inspirant du plus célèbre des poèmes de l'auteur américain (du moins pour le début du film), Le Corbeau joue la carte de la comédie fantastique burlesque et décomplexée. Ne vous attendez donc pas à avoir un quelconque frisson devant cette frasque à effets spéciaux multiples où nous assistons à un véritable affrontement déjanté entre plusieurs magiciens du XVe siècle !
Partant de cette étrange rencontre entre Erasmus Craven, un magicien endeuillé par la mort de sa femme, et un corbeau parlant, le scénario de Richard Matheson va s'enrichir d'une aventure excentrique où ledit corbeau est en fait Adolphus Bedlo, un sorcier transformé ainsi par un cruel rival, Scarabus, qui posséderai apparemment chez lui la défunte épouse de notre héros. À partir de là, Erasmus et Bedlo, revenu non sans mal sous sa forme humaine, accompagné par leurs enfants respectifs, vont se rendre au château de ce mystérieux Scarabus afin d'obtenir chacun des explications.
C'est le début d'une nuit pleine de rebondissements où humour et étrangetés vont s'entremêler avec légèreté... Roger Corman exploite donc à nouveau l'univers gothique de Poe et nous livre une excellente comédie fantastique où les frissons sont remplacés par les rires, le cabotinage des acteurs et le total manque de sérieux étant ici grandement de la partie. Entre un Vincent Price comme d'habitude parfait ici en sorcier peureux et avisé, un Peter Lorre pittoresque en collègue bougon porté sur la boisson et l'imposant Boris Karloff en troisième et maléfique luron, le casting est de choix, accompagné par la jolie Olive Sturgess et le alors débutant Jack Nicholson, qui avait déjà travaillé avec Corman sur La Petite Boutique des Horreurs.
Les scènes dites d'action qui auraient pu effrayer le spectateur tournent ainsi vite à la rigolade grâce au comique de situation et à la musique entrainante de Les Baxter comme lors de cette attaque tournant à la corrida humaine entre Bedlo et un serviteur possédé ou encore l'affrontement final entre Craven et Scarabus, plein d'effets visuels et de grimaces. Au final, en changeant radicalement de ton tout en conservant allégrement son atmosphère et ses décors gothiques, Roger Corman nous livre une version assez allumée du poème éponyme d'Edgar Allan Poe où l'on rit souvent et où la bonne humeur est sans cesse au rendez-vous.