"Yeah, yeah, I know I got rid of the headache. Now I got cancer."

La guilde des traducteurs de titres sous LSD a encore frappé. C'est terrible. Je cherche encore un escalier significatif dans le film, voire même la signification littérale d'un "coup de l'escalier".


Odds Against Tomorrow est un film noir ainsi qu'un caper movie (film de casse grosso modo) à la croisée d'une multitude de films traitant de thématiques similaires dans cette décade. Impossible de ne pas aborder ce film de Robert Wise dans la continuité d'un autre de ses films noirs avec Robert Ryan (Nous avons gagné ce soir, aka The Set-Up, 1949), et difficile de ne pas voir une parenté avec, par exemple, L'Ultime Razzia (The Killing) de Kubrick sorti en 1956. On pense très fortement à un autre film abordant le thème de la coopération forcée entre un Noir et un Blanc pas très progressiste, La Chaîne (The Defiant Ones) réalisé par Stanley Kramer en 1958. Une chose est sûre : c'est un festival de traductions hasardeuses. En tout état de cause, le présent film arrive après la bataille et c'est essentiellement sur Harry Belafonte, Robert Ryan et la trombine inimitable d'Ed Begley (pourtant dans un rôle de relatif gentil) qu'il faudra compter pour y trouver un sursaut d'intérêt au-delà du classicisme noir.


Les antagonismes initiaux paraissent un peu forcés de prime abord : Slater est un vétéran raciste qui ne parvient pas à se réinsérer en société (autre grande thématique de la période qui durera quelques décades) et qui se voit contraint de collaborer pour un braquage de banque avec Ingram, un crooner divorcé et endetté (qui n'est pas non plus blanc comme neige) qui se trouve être noir de peau. On peut savoir gré à Wise de s'adonner à une caractérisation conséquente de ses personnages, en décrivant pendant l'essentiel du film les raisons (des impasses financières) qui poussent chacun à participer au casse dans l'espoir de se renflouer. On peut noter un premier dénominateur commun : la relation avec leurs femmes respectives ne brille pas par leur harmonie. Deux ans avant le déluge chromatique de West Side Story, Wise s'enfonçait dans l'atmosphère très noire de New York, dans une ambiance presque toujours Jazzy, entre les parcs, les bars et les rues.


Wise avoua qu'à la fin du script original et du roman, les deux antagonistes devenaient amis et que c'est à cause de la trop grande ressemblance avec The Defiant Ones (avec Tony Curtis et Sidney Poitier) qu'il adopta une conclusion dans la direction de la haine destructrice plutôt que de la rédemption. Ce parti pris assumé sous la contrainte confère au film une sécheresse de ton plutôt appréciable, avec un sens de la fatalité presque omniprésent. C'est à l'image de la séquence finale ("Which is Which?" — "Take your pick.") dans laquelle personne ne parviendra à discerner les corps carbonisés du Blanc et du Noir. La tendance du film à thèse n'est jamais très loin, mais le plaidoyer conserve une belle part d'efficacité.


http://je-mattarde.com/index.php?post/Le-Coup-de-l-escalier-de-Robert-Wise-1959

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le 13 août 2020

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Morrinson

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