"Le cousin" marquait le retour d'Alain Corneau à son genre de prédilection, le polar, après plusieurs titres très éloignés du cinéma policier, notamment "Tous les matins du monde" et sa flopée de Césars.
Cinq ans plus tard, après le flop du "Nouveau monde", son film le plus personnel, Corneau revient donc au genre qui l'a fait connaître, avec des titres comme "Police Python 357" ou "Le choix des armes".

Pour ce faire, le cinéaste originaire d'Orléans choisit un angle pertinent et original : la relation particulièrement ambigüe qui se noue entre un policier et son indicateur (son "cousin").
Pour incarner ces deux héros, Corneau confie des rôles en total contre-emploi à deux comédiens considérés à l'époque comme des "comiques" : l'ex-Nul Alain Chabat et le bateleur Patrick Timsit.

Ce parti-pris audacieux constitue une réussite, même si Timsit en fait un peu trop à l'occasion (notamment lors de ses accès de violence) ; ce rôle de bon père de famille, à la fois dealer et balance, grande gueule et pathétique, lui va comme un gant. Quant à Chabat, il parvient à rendre attachant ce flic ambitieux et borderline, qui a tendance à délaisser sa femme et son petit garçon.
D'ailleurs, on sera gré à Alain Corneau d'avoir habilement contourné un cliché inévitable, puisque c'est pour une fois l'épouse du héros (incarnée avec délicatesse par Agnès Jaoui) qui est portée sur la bouteille. Dans le même ordre d'idée, on évite les disputes et les cris, au bénéfice de la distance quotidienne, pour un traitement adulte de cette problématique.

Le casting comprend aussi Samuel Le Bihan en chef de groupe dépassé, Caroline Proust qui étrennait ses habits de fliquette bien avant "Engrenages", et Marie Trintignant en juge d'instruction inflexible.

En bon amateur de cinéma policier à la française, je ne suis sans doute pas le plus objectif, mais j'ai passé un vrai bon moment devant "Le cousin". Sans éviter certaines maladresses et invraisemblances, Alain Corneau signe un petit polar remarquable, empreint de justesse et d'authenticité.
Avec l'aide de son co-scénariste Michel Alexandre (ancien flic, également consultant sur "L 627" de Tavernier), Corneau met en scène deux personnages intéressants, pour lesquels on ressent rapidement de l'empathie, bâtissant une histoire captivante autour de leur lien complexe, chacun prenant le dessus sur l'autre à un moment donné.

Rien de follement transcendant peut-être, mais un polar français "récent" bien ficelé et crédible, qui s'offre en prime quelques pointes d'humour et de critique sociale, ça mérite d'être salué et ça suffit amplement à mon bonheur.

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le 8 oct. 2023

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Val_Cancun

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