La filmographie d'Arnold pourrait être adaptée en BD. Ce serait un comics bien gras bien entendu, mais d'un enthousiasme et d'une générosité foisonnante uniques. Le héros, musculeux, friand de cigares et à la répartie d'un fin lyrisme bourrin qui peinera toujours à trouver son égal, serait la réplique d'un âge d'or du feuillet dessiné où les pages emportaient le lecteur dans une série d'époques et de mondes, sur d'autres planètes, dans d'autres univers ou perdu dans des temps oubliés. Cet énorme conte de fée raconté à la Gatling aurait peut-être même bien cette force des plus éloquents d'entre eux, là où le florilège d'action cache un fond parfois bien plus plaisant encore, l'histoire d'un type réalisant son rêve et devenant le dernier héros de toute une génération dans une authenticité rare. Bon j'en rajoute si j'veux mais voilà, moi Arnold, c'est le super héros de mon enfance. Tous les autres types en costume me font bien rigoler aujourd'hui quand je repense à Dutch, Jack, John, Ben, Conan, Doug ou à l'endosquelette de métal sous du tissu charnel.

Quand le retour d'un monument de ta vie cinématographique est fièrement annoncé, tout d'abord tu t'en branles un peu, ça fait longtemps que tu as pigé qu'il valait mieux se replonger dans les vieux classiques plutôt que d'espérer de réelles nouvelles aventures. Puis ça t'intrigue mais tu le laisses de côté, surement en proie à l'appréhension d'une déception qui s'introduit déjà comme évidente. Et enfin, tu croises le film et plus grand chose ne s'oppose à ce que tu ne tentes le truc. Sans grand espoir pour quoi que ce soit. Et d'ailleurs ça doit aider, parce que ça surprend plutôt bien.
Le scénario, pour le peu qu'il existe, est évidemment d'un stéréotype essoré. T'as l'vieux au passé sombre qui prend du repos à un poste pénard dans une petite bourgade perdue dans le désert. T'as l'jeune connard aux ambitions meurtrières qui lui veut juste passer une frontière en fonçant droit sur le vieux dont il ne soupçonne pas le passé. Voilà.

J'ai vraiment aimé Arnold dans ce rôle. Déjà, j'peux pas être très objectif. Ensuite, bien sûr, il fait tout l'film et c'est d'ailleurs pour ça qu'on va le voir, ce film. Mais y a pas que ça. On dit qu'il fait ici "le minimum", mais pourquoi attendre de lui l'émulsion d'antan là où l'allure du vieux croulant à la bedaine expressive lui sied à merveille. On est plus dans les 90's et le temps a sculpté son titan. Il n'est pas que le tank bipède qu'on attend, il peut aussi camper un rôle plus simple, plus modeste mais beaucoup plus vrai pour un film actuel, prenant une dimension nouvelle quand le passé perdu de son personnage résonne avec le passé de l'acteur et qu'on prend soudainement conscience que le méchant sans saveur va avoir à affronter Conan le Barbare. C'est lui quoi, du début à la fin. Généreux dans tout ce qu'il fait devant la caméra. C'est un vestige qui a de la gueule et du répondant, massif encore terriblement stable, le dernier héros d'action est un dernier rempart impénétrable, le roi de la déflagration est devenu une force tranquille un peu endormie, mais une vraie force.
C'est un film d'action réussi, qui rappelle un peu des trucs comme Unstoppable, aussi anachronique que sous-estimé. Y a des courses poursuites très acceptables, un rythme soutenu, et tout le blabla habituel pour expliquer qu'on en a plus ou moins pour sa tune. Le problème vient surement du grand méchant qui ne ressemble à rien d'autre qu'à un jeune con en pleine crise d'ambition puérile, qui n'est jamais ni convaincant, ni détestable comme tout bon méchant qui devrait se respecter. On ne l'craint pas vraiment, il endosse juste le rôle de la tête à claque ultime qu'on prend un plaisir fou à voir se faire fortement fesser par papy lors du final.

Dans la longue suite de comics que serait la filmo d'Arnold, The Last Stand serait un hors série, une petite friandise hommage, mais une friandise honnête, slalomant astucieusement entre les pièges du pur fan service. C'est un film d'action qui fait parfaitement son job et c'est surtout un Arnold qui s'offre une gueule nouvelle, pesante et touchante d'authenticité (j'écris c'que j'veux bordel). J'ai hâte de le retrouver dans d'autres rôles où l'acteur prendra encore un peu le pas sur le vestige de l'action-star et surtout ailleurs que dans cette visite guidée du Muséum d'Histoire Naturelle qu'est devenue la franchise Expendables.
zombiraptor

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