N’ayant pas lu l’œuvre originale, il me semble quand même que le défi du réalisateur Laurent Tirard a été de rendre le film Le Discours vivant et fluide. Il le fait d’entrée avec un Benjamin Lavernhe récitant la distribution du film mais aussi pour annoncer une dramaturgie particulière. L’anti-héros du Discours,Adrien, raconte donc deux événements se superposant soit sa copine lui demandant de faire une pause avec l’insistance de son futur beau-frère pour qu’il fasse un speech lors de son mariage avec sa sœur.L’exercice se corse car le jeune homme profite pour mettre en abyme sa famille ainsi que sa relation conjugale avec Sonia.Ainsi, le spectateur se retrouve dans le subconscient d’Adrien épluchant les moindres événements, faits et gestes des uns et des autres, et de voir ce qui l’agace, l’angoisse ou le lasse prodigieusement.Laurent Tirard, en choisissant de citer des passages entiers du texte original, et en montrant un Adrien faire des arrêts sur images sur certaines actions, ou anticiper des moments plus ou moins réussis du discours qu’il pourrait prononcer, propose une mise en scène dynamique où le spectateur doit suivre le jeune homme et véritablement cerner ce qui le tracasse.En filigrane, on peut voir quand même un angoissé chronique ayant peur de l’imprévu et de tout ce qui peut lui échapper. Fort heureusement, le final confirme la réaction d’Adrien sur les événements et comment il parvient à reprendre le contrôle sur des moments à priori surmontables.Ce qui m’a intéressé dans la salle, c’est que les gens ne rient pas forcément aux mêmes moments des situations proposées par le film. Il serait donc question d’appropriation de l’action et de constater lesquelles résonnent chez les uns et les autres.Dire aussi que le Discours est un film tout à fait comique n’est pas fondé car le rire peut naître du gêne et du décalage émotionnel entre personnages ( Adrien,sa mère et sa sœur ayant des personnalités complètement opposées par exemple.) Quelque part, en regardant évoluer sa famille,ses proches et sa petite amie Sonia, Adrien scrute avec mordant,comme un acteur de la Commedia dell’ Arte,tous leurs travers et c’est le trait ironique qui l’emporte.Quelque part, ce qui est proposé de prime abord dans le Discours cache un contexte sous-jacent et entre zygomatiques et neurones, il ne faut pas faire vraiment de choix pour apprécier l’ensemble.Un dernier mot sur le casting éminemment brillant du film ( Sara Giraudeau, Francois Morel, Julia Piaton entre autres) arrivant à jouer avec brio sur les ruptures de ton proposées par l’histoire. Il ne faut pas craindre de voir un film cérébral, quasiment en huit clos, donc très proche du théâtre pour aborder aussi le Discours, n’étant pas tout à fait un film de cinéma de par sa forme.

Specliseur
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le 10 juin 2021

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