Un dragon s’étant établi depuis longtemps dans le royaume d’Urland sans que personne n’ait su l’en déloger, les habitants du pays font appel à un des derniers sorciers en vie, Ulrich (Ralph Richardson). Mais ce dernier mourant avant d’effectuer le voyage, c’est son apprenti Galen (Peter MacNicol) qui s’en charge finalement. Face à la menace réelle, il va rapidement perdre ses belles illusions…


Le début des années 1980 marque un tournant important dans les productions Disney. En effet, c’est l’époque où les studios tentent d’autres choses que celles qui leur ont assuré la popularité depuis maintenant plus de 30 ans, et ce pour le meilleur (La Foire des ténèbres) ou pour le pire (Le Trou noir). Avec Le Dragon du lac de feu, on s’éloigne donc des standards du divertissement familial pour entrer sur le terrain plus risqué de la fantasy médiévale, réservé à un public plus adolescent et adulte. Pour autant, le film est une vraie réussite, et s’il ne connut pas un grand succès à l’époque de sa sortie, acquerra une solide réputation au fil des années. On le comprend, tant l’ambiance créée ici par Matthew Robbins est d’une immersion remarquable.
Ayant écrit lui-même le scénario à partir d’une idée qui lui était venue en regardant le segment L’Apprenti Sorcier de Fantasia, Robbins nous entraîne dans un fantastique voyage médiéval au pays des dragons, en s’amusant à bouleverser quelque peu les codes habituels du genre. En effet, loin du héros valeureux et parfait que l’on connaît, Galen, le personnage principal, est assez peu sympathique : fanfaron et guère persévérant (au début), il devra s’y reprendre à plusieurs fois pour venir à bout du dragon, qu’il ne vaincra finalement même pas lui-même. Guère aidé par une prestation assez fadasse de Peter MacNicol, il s’efface donc au profit de personnages beaucoup plus intéressants, tels que le fascinant Ulrich (forcément, c'est Ralph Richardson qui l'incarne), équivalent puissant et très réussi d’Obi-Wan Kenobi ou de Gandalf, à qui l’on devra les meilleurs retournements du film.
On remarquera aussi une belle place accordée aux personnages féminins, que ce soit la belle Valérik obligée de se déguiser en garçon pour tenter d’échapper au tirage au sort qui désigne les vierges qui seront offertes en pâture à la bête féroce, ou encore la princesse, qui découvre avec horreur que son père le roi ne la fait jamais participer à ce tirage au sort pour la protéger, creusant le fossé entre lui et son peuple. S’appuyant sur des personnages inégaux, donc, mais souvent intéressants (l’idée du roi qui profite du dragon pour maintenir son pouvoir sur le peuple est bonne mais pas assez développée), le scénario s’appuie sur une simplicité qui fait finalement sa force pour nous offrir un solide récit de fantasy.


Mais si l’ambiance fonctionne à ce point, c’est essentiellement grâce à Derek Vanlint, directeur de la photographie extrêmement talentueux à la carrière ridiculement courte (quatre films en tout, dont celui-ci, Alien : le huitième passager et X-Men), qui nous offre des plans iconiques à souhait, conférant au film toute son ampleur sans jamais renier un bel intimisme.
C’est aussi, bien évidemment, aux responsables des effets spéciaux que l’on doit cette réussite visuelle, les grands Brian Johnson (Alien : le huitième passager, Star Wars, épisode V : L’Empire contre-attaque) et Dennis Muren (la saga Star Wars, Terminator 2, Jurassic Park). Le dragon qu’ils créent est ici incroyable : il sera d’ailleurs cité comme influence par Guillermo del Toro ou George R.R. Martin, ce qu’on comprend tout-à-fait. Animatronique extrêmement réaliste, grâce à une animation rigoureuse en go-motion, la créature a certes vieilli sur certaines images, mais reste terriblement marquante par sa majesté, d’autant que ses scènes sont parfaitement dramatisées, ne révélant la bête que peu à peu pour ne l'en rendre que plus colossale au moment où on la voit enfin.
Indéniablement, et conformément à l'avis général, c’est donc le dragon la plus grande réussite d’un film à la mythologie pourtant dense. Une mythologie dense, mais dont on a parfois le sentiment que Matthew Robbins ne l’exploite pas jusqu’au bout, ne profitant pas assez, par exemple, d’avoir situé son intrigue au moment de la transition entre le paganisme celte et le christianisme apporté par des missionnaires étrangers, pour développer sa réflexion, pourtant présente, sur la difficile transition entre les deux.
Mais on ne lui en tiendra pas trop rigueur, tant Le Dragon du lac de feu s’avère un film très riche, qui captive pendant 1h45, et réussit surtout à surprendre son spectateur sans faire appel à des retournements rocambolesques. Un joli tour de force, qu’il semble impossible de pouvoir réitérer aujourd’hui…

Tonto
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le 17 sept. 2018

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Tonto

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