Encore un Ozu qui m' a beaucoup plu. C'est toujours un plaisir de retrouver ses films, surtout qu'avec le temps on retrouve les mêmes acteurs, les mêmes décors parfois, souvent la même trame. Suivre Ozu, c'est un peu suivre une troupe de théâtre qui organise des variations sur un thème de représentation en représentation...
"Le goût du sake" m'a rappelé en particulier "Le voyage à Tokyo" pour son ton légèrement désabusé et son constat amer sur la désagrégation de la famille. Comme d'habitude il est question du mariage de la fille. Ici Hirayama, le père de famille, (joué par Chishū Ryū, l'acteur fétiche de Ozu) doit faire face à la proposition d'un de ses collègues de travail de marier sa fille Michiko en un mariage arrangé. Le film va jouer sur les hésitations du père à accepter le fait que sa fille est en âge de quitter le foyer et donc de le laisser seul (En tant que veuf grande est la tentation de garder as fille pour s'occuper de l'intendance). Cette menace du départ de sa fille va générer une angoisse qui devient palpable au fur et à mesure que le film avance.


Contrairement à d'autres films de Ozu, le focus est principalement sur le personnage du père et non sur sa fille (mais il y a aussi une intéressante trame secondaire avec son fils). On le suivra au cours de soirées bien arrosées, alors qu'il est confronté à l'opinion et l'exemple de ses amis et connaissances. J'ai trouvé intéressant ces réunions d'anciens de l'école qui faisaient et font toujours parti d'un rituel qui lient fortement les japonais avec leurs amis d'enfance. Lors des ces réunions, un vieux professeur, un peu moqué par ses anciens élèves, devient un personnage touchant dans sa déchéance, et sa situation personnelle (veuf lui aussi, il a empêché sa fille de se marier pour la garder auprès de lui) va informer la décision finale de Hirayama.


Moins de sourires que d'habitude donc en regardant ce film, une certaine gravité même, alors que se jouent les déchirures entre jeune et vieille génération, entre tradition et modernité. (Toujours cette confrontation entre les intérieurs traditionnels, et cette modernité du monde urbain, bureaux, trains, électricité etc... ). La beauté habituelle des plans fixes, l'humanité et al subtilité des situations, et cette pesanteur du temps qui passe et qui traverse l'image, tout fait de ce film un beau spectacle que je vous recommande guys et guysettes.

nostromo
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le 29 août 2016

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