"Le Grand Silence" est un film très étrange. Dès le commencement, l'on comprend clairement que l'expérience sera unique. Seulement, voilà qu'il se trouve quelque chose dans ce film que je n'aime guère, un petit détail qui me gêne. Est-ce au niveau de la mise en scène? Je le pense sincèement. Les effets terriblement kitsch proférés par Sergio Corbucci m'ont grandement dérangé; c'est bourré de zooms, d'effets dégueulasses et insupportables.
Et c'est dommage, parce qu'en fait, "Le Grand Silence" semble, aux vues de sa mise en scène pas toujours inspirée, n'être rien de plus qu'une pauvre petite série b. Au départ, l'aspect esthétique est vraiment daté; la réalisation déçoit grandement; elle manque d'impact, d'intensité, d'ampleur et d'imagination. C'est un joyeux bordel. Cela ne concerne que l'introduction. Mais à étudier la mise en scène de plus près, il paraît évident que le travail de Corbucci ne fut guère limité, au jour de sa sortie, et ne l'est toujours pas de nos jours.
Au niveau des acteurs, c'est pas vraiment génial non plus. La direction d'acteurs, pas terrible, déçoit un chouilla, tout comme le jeu de Klaus Kinski, qui manque cruellement de charisme. La déception n'est rien comparée à celle liée à celle conférée par Jean-Louis Trintignan, pas crédible pour un soû, car manquant crullement de présence. Il s'impose peu, arborant constamment un regard de chien battu.
La bande-son manque, quant à elle, de constance, d'une qualité à toute épreuve. Et c'est dommage, parce qu'une bonne OST permettait aux westerns spaghetti de transcender le genre, de le surpasser. Néanmoins, si "Le Grand Silence" marque tant c'est, je pense, bien plus pour son écriture que pour les défauts sus-cités.
Le scénario, pas trop con, surprend de par son originalité visible, et les thèmes rebattus tout du long. Prétexte parfait pour nous montrer de bonnes scènes de gunfight à l'ancienne, l'intrigue s'avère convaincante et dépaysante, à l'image de ces magnifiques décors faits de neige et de glace, d'une nature qui s'étend plus loin que l'horyzon, étrange entité infinie, éternelle chose immuable.
Dans le paysage des westerns, "Le Grand Silence" fait office de véritable ovni. Unique, atypique, réfléchi et étrangement profond, il livre une pensée pertinente et appréciable sur la notion du bien et du mal, sur ce qui fait du héros le gentil, et de l'antagoniste le méchant. La grande particularité du film, c'est qu'il n'y a ni méchant ni gentil; tous les hommes, toutes les femmes, tous les êtres humains sont identiquement intéressés par la violence et l'argent, sans qu'aucun ne soit possiblement secourable.
Il n'y a pas d'homme supérieur, de bonne femme; nous sommes tous des salopards, des êtres vils et mauvais, vains et sadiques, inutiles et profondément corrompus. En voilà, une grande réflexion qui porte ses couilles. Une réflexion d'autant plus appuyée par le rythme lent de l'oeuvre, qui permet de se poser nombre de questions sur notre propre personnalité, si ressemblons plus à l'un ou l'autre des personnages.
Le soucis, et c'est ce qui m'a empêché de mieux le noter, c'est que la mise en scène plombe complètement certains passages proprement magnifiques et magnifiquement badass du film. Ainsi, la scène du gunfight dans le bar, aussi classe soit elle, est complètement gâchée par le manque de maîtrise de la caméra de Corbucci, et un mauvais cadrage de l'action. Dommage, c'aurait pu être un grand moment de cinéma. A noter, également, une conclusion terrible et couillue des plus inhabituelles. Une bonne série b avec un message profondément beau et humaniste. Convaincant.
Un petit tour sur ma page Facebook? Je vous laisse le lien : https://www.facebook.com/Culture-Geek-1511507399161430/?ref=aymt_homepage_panel