Les paysages sont magnifiques (la Nouvelle-Zélande est décidément un beau pays), les décors grandioses. Les costumes et maquillages sont extrêmement soignés. Les armes et armures tout à fait crédibles. L'univers fantastique en général est réaliste à souhait et a permis d'installer une trilogie du Seigneur des Anneaux légendaire.

Mais que s'est-il passé entre les deux trilogies ? Certes, Bilbo en roman est clairement orienté en direction des plus jeunes. Mais fallait-il vraiment sombrer dans le grossier pour toucher un public large ?
De l'outrance, il y en avait déjà dans les deux premiers opus. J'espérais follement que Peter Jackson finirait pas se ressaisir. Ça n'a pas été le cas. On ne se refait pas, surtout quand le succès vous permet 1001 folies visuelles.

Au niveau des incohérences qui me font bien sortir de l'ambiance, la liste pourrait ressembler à un inventaire à la Prévert (attention spoilers à la brouette) :
- des combats façon jeu vidéo (Saruman, Elrond et Galadrielle VS les neuf Nazguls et un avatar de Sauron) bien inadéquats dans cet univers ;
-des chèvres caparaçonnées qui apparaissent comme par enchantement pour emporter les nains à l'assaut du méchant qui a installé sans que personne ne s'en aperçoive d'immenses systèmes de communication visuelle (les nains sont comme les taupes, manifestement complètement myopes) ;
-des vers géants tout droit sortis d'Arrakis (ce n'est pas Dune qu'il fallait lire avant de réaliser le film M. Jackson !), vu le barouf qu'ils font avant d'émerger du sol, on a déjà vu mieux en termes de surprise stratégique ;
-un roi nain bardé de métal qui se dévêt et se met en chemise pour charger des hordes d'orques au combat (!) ;
-un combat du même roi nain contre le chef des orques sur une étendue gelée qui tourne au n'importe quoi (je suis un orque bardé de fer qui flotte sous la croûte de glace, ne craint pas l'eau glacée, respire avec des branchies et jaillit au travers d'une épaisse couche de glace sans le moindre appui pour taper le roi nain) ;
-je suis un un prince elfe qui pilote un troll (les elfes adorent pratiquer ce hobby dès leur plus jeune âge dans les forêts profondes) avec une dague plantée dans le cerveau, fait effondrer une tour qui sert donc de pont entre deux falaises (un enfant de 3 ans qui fait tomber une tour de kapla sait que l'ensemble ne demeurera pas structuré) ; je sais aussi bondir sur des moellons qui choient, une forme de lévitation en somme...
-un magicien (c'est juste l'un des 5 istari, détenteur de l'un des trois anneaux elfiques) qui dit savoir depuis longtemps que le hobbit a trouvé un anneau magique (T-T) , les anneaux enchantés étant très courants comme objets dans la terre du milieu, comme tout un chacun le sait bien (!!!) ;

On a clairement quitté le monde de la Terre du Milieu pour celui d'une fantasy débridée totalement déconnectée des règles physiques de base qui gouvernent le monde matériel tel que nous l'appréhendons. Les combats sont bien mal chorégraphiés (trop longs et emplis d'échanges de coups inutiles) et la bataille des cinq armées brouillonne à souhaits (une succession de face à face bien mal orchestrés et émaillée d'incongruités, comme des elfes qui sautent par-dessus un mur de lances naines afin de se retrouver "entre le marteau et l'enclume", une logique guerrière différente et assez absconse).

Au-delà de ces scènes qui m'irritent car elles ne servent pas le propos, le reproche principal que j'adresserai à P. Jackson est le manque cruel d'émotion qui se dégage de cette trilogie. Autant le Seigneur des Anneaux m’étreint d'émotion à intervalles réguliers, autant le hobbit me laisse de glace (oui, comme le méchant chef orque !). J'ai regardé ce spectacle (les larmes de Tauriel, la souffrance de Gandalf, la mort des réfugiés de Dale, les tourments puis la mort de Thorin) avec autant d'empathie qu'un bulot mort.

Au final, c'est beau mais la narration est bien mal construite (un film beaucoup trop délayé) et chorégraphiée... un sacré gâchis vu le potentiel énorme !!! On est bien loin de la cuisine raffinée des hobbits. Là, c'est plutôt un infâme brouet orque que l'on nous sert.
Apostille
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le 12 déc. 2014

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Apostille

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