Dans le même tonneau, mais d'un meilleur millésime. Qui l'eut cru ?

Le film s’ouvre sur un travelling assez ambitieux dans le village de Bree. Et alors que la caméra s’abaisse au niveau de la grand rue, un type barbu grincheux passe devant la caméra en mangeant une carotte. Murmure et rires dans la salle. Ayant conscience d’être très intelligent, je m’écrie « Hey, mais c’est Peter Jackson ! ». « Ta gueule ! » me réplique le pote venu profiter de mon abonnement Gaumont Pathé, approuvé par tous les spectateurs alentours. Qu’on se le dise, ce Hobbit 2 commence très bien. Je trouverai toujours abominablement rasoir la piteuse initiation de la trilogie, mais sur cette suite, Peter insiste moins sur l’humour et se la joue nettement plus sérieux. Si Radagast est obligé de revenir polluer l’intrigue, il ferme désormais sa gueule et oublie de passer pour un revival de Narnia, ce qui fait carrément plaisir. D’ailleurs, ce Hobbit assume davantage sa carrure de divertissement familial en évitant de prendre son public par le bas. A l’exception d’un point noir sentimental que j’aborderai plus loin, les sentiments ne sont pas exagérés, et les morceaux de bravoure s’enchaînent en oubliant les Deus ex Machina du premier (exit Gandalf et ses multiples sorts trop cheatés). Même les scènes cultes évitent de s’alourdir (je pense notamment à celle des Trolls dans le prédécesseur, abominable de lourdeur). Le baptême de Dard, la fuite dans les tonneaux, le face à face avec Smaug (un peu longuet, mais pas ridicule), les forges des nains… Tous ces gros arguments sont traités sobrement, et quand l’excès arrive, c’est avec un ton bon enfant complètement réjouissant qui va de pair avec l’étoffe de cette nouvelle saga d’aventure (les ravages d’un nain dans un tonneau, Legolas qui virevolte en défiant les lois de la vraisemblance…). Questions paysages, on en a à nouveau pour notre argent, et malgré le recyclage de quelques lieux de tournages, le résultat a quand même une sacré gueule. Question musique, le compositeur semble enfin s’être réveillé, en composant davantage de nouveaux morceaux. Hélas, aucun n’a la trempe de l’hymne de son prédécesseur, que ce soit pour le chant des nains ou le thème principal. Enfin, concernant le dragon Smaug… On se contentera de dire qu’ils ne l’ont pas foiré, c’est d’ailleurs un des plus beaux dragons de l’histoire du cinéma. Trop bavard, sans doute, mais efficace. Et, une fois que vous l’aurez vu, vous pourrez enfin oser la comparaison avec Alien 3, que je n’ose développer. On en vient maintenant aux points négatifs.

Déjà, question sentiments, cette suite s’encombre d’une pseudo-amourette entre un nain et une elfe (taurielle). Depuis Blanche Fesse et les sept mains, j’ai tendance à approuver l’idée que c’est pas la taille qui compte, mais quand même, faudrait pas non plus abuser sous prétexte de donner un message d’intégration des minorités. Oui, c’est mignon, mais lourd, inutile, et surtout, l’espèce de trio amoureux avec Legolas, c’est digne d’un Harry Potter 7 ! L’apothéose du ridicule sera atteinte sur la fin, au cours d’une séquence en surbrillance très gênante qui semble tout droit sortir d’un Amour Gloire & Beauté, le passage où Brett voit Jenny pour la première fois… Avec les anachronismes, on poursuit avec l’épouvantable scène de combat entre Gandalf et le Necromancien. Je n’en dévoilerai pas l’issue, mais le déroulement de ce combat est… terriblement répétitif. Et sa conclusion fait exploser de rire. Le monteur, pris d’une frénésie et sous l’influence de psychotropes, a trouvé un concept sympa pour enfin montrer l’identité véritable du Nécromancien. Mais il la fait évoluer en une sorte de vision psychédélique pas très éloignée du trip sensitif de 2001 L’ODYSSEE DE L’ESPACE ! Allo, quoi ! Un suicide artistique intégral. D’ailleurs, cet épisode est complètement laissé en suspens, signe des problèmes évidents de gestion scénaristique de ce film. On passe maintenant aux défauts techniques. La séquence avec les tonneaux, elle est très bien. Y a de l’action, du mouvement, de l’aventure, quoi ! Et des plans en GO-PRO. Oui, vraiment ! Des plans GO-PRO en HD, rajouté comme ça, l’air de rien, au milieu de l’action… Mais c’est quoi cette idée de chiotte ? C’est suicidaire, artistiquement parlant, d’utiliser une GO PRO de façon si voyante, à moins que ça soit une pub déguisée. Comme pour le coup du Cognac ! Enfin, question photographie, le film est beaucoup trop sombre. Certes, dans les mines, il fait rarement clair, mais il est bon de voir quelque chose parfois. Au moins pour le plaisir des yeux. Une petite imperfection technique qui se ressent surtout dans les passages sombres du film, ou le gris s’impose comme la couleur dominante. Enfin, le dénouement. Moins 2 points d’office ! Je n’ai pas entendu une seule personne ne pas insulter Peter Jackson dans la salle devant la façon dont il conclut son film. Peter Jackson, sale enfoiré ! On le savait que tu voulais du fric, mais là, si je te croise dans la rue, tu te prends une baffe ! On ne la fait pas comme ça à son public… C’est… C’est encore pire que Prometheus ! Moins 2, d’office ! Et vu que tu te retrouves obligé de commencer la suite par un flash back (obligé, à moins de faire le pari suicidaire de faire commencer immédiatement l’action), moins 1 déjà pour Le Hobbit 3 ! Bravo Peter, on récolte ce que l’on sème ! Fumier !

Sinon, The Hobbit, la désolation de Smaug est sympa, on s’y amuse davantage qu’avant, l’humour est moins envahissant, et malgré un rythme globalement poussif (pas grand-chose entre les scènes d’action), il passe davantage, à l’image d’un Thor 2. Allez, la saga n’est peut être pas encore foutue…

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le 11 déc. 2013

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Voracinéphile

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