Le génie du mixage Andrew Adamson revient tout juste après ses deux premiers volets de « Shrek ». Aux commandes de l’adaptation du roman éponyme de C.S. Lewis, il déterre une mythologie littéraire à franc succès en librairie. Pouvons-nous en dire autant sur grand écran ? Et bien il y a un début à tout et ce n’est pas pour déplaire. L’analogie à J.R.R. Tolkien peut surprendre, sachant qu’il fut très proche de Lewis. Il n’y a donc pas de divergence dans les bases religieuses qui les ont inspirées tous les deux. Cependant, Lewis parvient à construire un univers unique et façonné aussi bien pour la lecture de jeunes adolescents que des adultes attentifs.
La fantaisie est alors amenée par les sinistres drames qui ont frappé l’Angleterre pendant la Seconde Guerre Mondiale. Quatre enfants, deux frères et deux sœurs, constituent tout le point central du récit les menant au royaume de Narnia. La notion que cette guerre insuffle à leur vie d’enfant est tout aussi merveilleux que l’univers qu’ils vont chacun appréhender à leur manière. Tous humains, ils sont dotés de la sincérité, et courage et de l’amour pour leur famille. Chacun représente le fragment d’une seule pièce qui les rendra inséparables par la suite. Mais si fragment il y a, déchirement familial il y a. Ces derniers traverseront un océan de danger qui les mettront à l’épreuve. Tout d’abord, on insiste sur leur faiblesse car on ne le connait pas plus que leur nom et leur goût pour les sucreries. Un enfant prétend au bout d’un moment à revendiquer sa maturité et sa responsabilité. Elle nait d’une sagesse qu’il doit trouver dans une pureté de l’âme. Voilà on l’on souhaite en venir. Le cœur d’un enfant est déviant et prendre soin de son prochain, tout comme de soi-même est une nécessité pour satisfaire chacune de ces transitions. Le roman, tout comme le film, le raconte avec justesse.
Si l’on bascule dans le côté créatif, l’univers de Narnia est ambitieux car propose pas moins de 23 espèces différentes. Une diversité qui marque davantage le cœur d’un enfant se laissant porter par tout un panel imaginaire. Il y a de quoi en combler plus d’un et le rendu est très satisfaisant. Ce que l’intrigue aborde également, ce sont tous ces symboles liés au christianisme. L’auteur ne cache rien et révèle des sources directes, tels que les noms « Adam et Eve », afin d’approfondir cette aventure médiévale. Cela dit, le rôle d’Aslan est tout aussi significatif alors qu’il illustre parfaitement la figure du Christ. Le doter d’une apparence animale, comme le roi des animaux, Lewis engage la foi de son œuvre vers ce que l’Homme priait chaque jour. D’autres apparitions, notamment du type caméo, appuient cette observation sans pour autant influencer une reconversion. Ces références peuvent sembler pulpeuses avec le temps mais c’est bien là que réside la force du film, car intuitivement, nous recollons les pièces d’un engrenage qui se met rapidement à sa place.
Mais comme il faut une dose d’épique, Harry Gregson-Williams sonne la charge en premier lieu avec une bande-son très attrayante et dynamique. Ce qui n’est pas toujours maitrisé dans une mise en scène qui traine sur des longueurs, jusqu’à en oublier le principal intérêt de cette subtile évasion. On multiplie les rebondissements pour le plaisir de laisser la visibilité à chaque enfant. Et il arrive que l’on entre en contradiction avec ce que l’on défend, sans s’en rendre compte. Entre la fiction et la réalité, il y a un mauvais mariage qui laisse perplexe. On parle de royauté et d’adolescence, n’y-a-t-il pas des doutes quant à la démarche vers l’enseignement ? Chacun est maître de son jugement.
Au final, « Le Monde de Narnia Chapitre 1 - Le lion, la sorcière blanche et l'armoire magique » émerveille. Il sait parler aux plus jeunes et ils comprennent le symbolisme que l’auteur souhaite partager. Là où l’adaptation pèche, c’est dans ce conte aux fortes convictions, mais qui n’assument pas toujours son discours éducatif. Malgré tout, il faut souligner cette tendance bénéfique, qui incite tant bien les personnes à s’intéresser aux fonds des propos qu’à les replonger tête baissée, le livre dans les mains !