Le monde est à toi est supposé être une comédie. Bonne idée que de tenter de régénérer un genre gravement sinistré dans notre pays. On a dit la même chose de Au poste ! de Dupieux, avec son humour absurde qui se situe à mille lieux de celui de Gavras, beaucoup plus référentiel et systématiquement basé sur les étrangetés de comportements de ses personnages ou les détournements de situation des clichés de films de gangsters. Car Le monde est à toi en est un, pas si différent de certaines bandes obscures tournées dans les années 50, souvent pour le pire plutôt que pour le meilleur. Le scénario est ici accablant, si tant est qu'il existe vraiment. Une histoire de pieds nickelés, qu'ils soient de banlieue ne change rien à l'affaire, dans des péripéties où l'on retrouve gros flingues, caïds pathétiques, drogue, femme fatale, plage au soleil (dans le laid béton de Benidorm) et même une mère indigne. Un cocktail détonant ? Oui, s'il y avait un minimum d'écriture et d'intensité et si possible une interprétation au niveau. Il n'y a rien de tout cela dans Le monde à toi, juste quelques bribes éparses d'un récit plutôt confus et des acteurs en roue libre (Damiens, Katerine, Adjani, etc) avec en guise de vedette un Karim Leklou loin d'être impérial, qu'on a vu bien meilleur dans des rôles pourtant secondaires. Visiblement, Romain Gavras a voulu tourner un film cool et fun, en s'amusant à balancer du Sardou et du Balavoine, pour prendre la galerie des spectateurs à revers. Tout le film est donc une question de posture, ou d'imposture si l'on préfère, avec un style travaillé pour faire passer la pilule. Moyennant quoi, on en revient toujours à la question du scénario. Quand il est inepte comme ici, aucune patte, aussi douée soit-elle, ne peut réparer les dégâts ou alors il faut être un très très bon metteur en scène ce que Gavras n'est pas (encore ?).